CD : François Couperin (1668-1733) - Les Nations

couperin-les-nationspar Les Ombres
dirigées par Margaux Blanchard et Sylvain Sartre
Durée : 51’
AMY 035
www.ambronay.org (Harmonia Mundi)
Notation : etoile-bleueetoile-bleueetoile-bleueetoile-bleueetoile-bleue(5/5)

J’avais déjà chroniqué le premier CD que Les Ombres avaient consacré à François Couperin, le Concert chez la Reine, (Apothéose de Lully) avec prononciation restituée, qui m’avait subjuguée (voir article). Les revoici, avec un coffret contenant Les Nations, quatre sonates, que Couperin appelle « sonades » et suites de simphonies en trio. L’intelligence, la finesse, la subtilité des Ombres, et notamment de ses deux directeurs artistiques, la gambiste Margaux Blanchard et le flûtiste Sylvain Sartre, ont été de varier les trios en jouant avec les possibilités qu’offraient, outre le clavecin de Nadja Lesaulnier, les trois violonistes, les deux hautboïstes, la bassoniste, le joueur de théorbe, d’archiluth et de guitare, ainsi que l’autre joueur de flûte traversière que compte le groupe.

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Le premier CD regroupe deux ordres (nous dirions aujourd’hui deux suites) ceux de La Françoise et de l’Espagnole. Cela donne donc une « sonade » à la française, puis une suite de danses, une allemande tendre, deux courantes rapides, une sarabande grave, une gigue bien enlevée, une chaconne « modérée », une courte gavotte et un menuet tout aussi fugitif. Puis une « sonade » à l’espagnole, et également une suite, allemande, deux courantes, sarabande, gigue lourée, gavotte, rondeau, bourrée et passacaille. Tout l’art de Couperin a été, par des nuances, de montrer les menues différences, les pointes d’accent qui colorent une même musique. Faire de lui un Européen avant la lettre est sans doute une erreur historique, car pour parler de supranationalité, encore faudrait-il que les nationalités aient vu le jour. Mais Couperin a réussi certainement à montrer que la musique, l’élégance, le bon goût pouvaient être communs à la même classe sociale, en l’occurrence l’aristocratie européenne. Et mettre fin ainsi à la querelle des bouffons qui empoisonnait l’atmosphère. Si son œuvre s’appelle Les Goûts réunis, ce n’est sans doute pas pour rien.

Le second CD réunit deux autres ordres, avec l’Impériale (autrement dit) la Germanique et la Piémontaise (disons l’Italienne en devenir). Là également, ce sont les ordres, avec « sonade », à l’allemande, puis les danses, allemande, deux courantes, bourrée, gigue, rondeau, chaconne et menuet pour la première et « sonade » à l’italienne, allemande, deux courantes, sarabande rondeau et gigue pour la seconde.

Il est sûr que la Piémontaise est plus enlevée, plus facétieuse, l’Impériale plus puissante, plus sérieuse, l’Espagnole plus solennelle, plus pénétrée de son importance, et la Françoise plus équilibrée, plus mesurée, plus majestueuse, mais l’essentiel est ce qui forge leur unité. En ce sens, c’est vrai que François Couperin est, à sa manière, un précurseur de la paix en Europe. Pourtant, les traineurs de sabre n’ont pas manqué après lui.

L’interprétation de ces Nations, par les Ombres, va être un choc musical pour beaucoup d’auditeurs. L’élégance, le raffinement, le rêve et la séduction sont rendus à loisir par ces trios multiples où les interprètes sont parfaits.

Ajoutons que le CD se termine, après un long silence, par la reprise de Benjamin Alard, sur l’orgue Parisot de  l’église St Rémy de Dieppe, du « légèrement » de la « Sonade » de l’Impériale, que Jean-Sébastien Bach transcrivit en aria en fa M (BWV 587). Pouvait-on trouver meilleur hommage ?

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Le livret trilingue est, comme toujours chez Ambronay, d’une qualité exceptionnelle.

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