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  • Michel Jakubowicz
  • Musique

CD : Les Musiciens et la Grande Guerre, vol IV, "Mélodies, Prescience, Conscience"

melodies-presence-cosncience

Halphen, Février, Jürgens, Ravel, Butterworth, Kelly, Fauré, Farrar, Devaere , Stephan, Debussy ,
Hahn , Schulhoff
avec Marc Mauillon (baryton), Anne Le Bozec (piano Bechstein)
WWW1 Editions Hortus
durée du CD : 69’ 49’’
notation : etoile-bleueetoile-bleueetoile-bleueetoile-bleueetoile-grise(4/5)

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Pendant toute la durée du conflit qui débutant en 1914 et ne prit fin qu’en 1918, les compositeurs allemands, français et anglais engagés ou non dans cette guerre meurtrière, tentèrent tant bien que mal de composer songs, mélodies et lieder. Ce CD en est le vivant témoignage, prouvant que malgré la barbarie des combats, une pensée musicale pouvait encore s’exprimer.

Fernand Gustave Halphen qui disparaît le 16 mai 1917 au front, eut le privilège d’être guidé dès l’âge de dix ans par Gabriel Fauré, devenant ensuite après son entrée au Conservatoire de Paris, élève de Jules Massenet. Il figure dans ce CD avec une brève mélodie, Pour Cythère dans laquelle s’affirme déjà un talent de mélodiste léger et vif. Henri Février survécut au conflit et s’imposa non seulement dans la musique de chambre, la musique pour piano, mais également dans l’opéra où ses œuvres rencontrèrent le succès. La dernière Chanson qui constitue sa contribution à ce CD est d’une belle facture ne reniant nullement son héritage fauréen…C’est du côté allemand que se situe Fritz Jürgens qui malheureusement disparaît en Champagne le 25 septembre 1915. Ses quatre lieder figurant dans ce CD accusent à l’évidence une forte influence venue de Brahms perceptible dans Das Treue Paar et dans Der Geworbene alors que les lieder suivants, Geh Nicht et Fromm seraient plutôt sous l’emprise d’un Hugo Wolf. L’accompagnement pianistique, d’une grande sensibilité reste sous l’influence harmonique des pièces pour piano de Johannes Brahms. Le compositeur du Boléro et de Daphnis et Chloé, Maurice Ravel, est aussi présent dans ce CD avec Trois chansons de 1915(extraits), ce qui nous permet d’écouter la facétieuse mélodie Nicolette qui sera suivie par la très mélancolique Trois beaux oiseaux du paradis. Ami de Ralph Vaughan Williams, George Butterworth qui disparut dans la bataille de la Somme en 1916 s’intéressa durant sa trop brève existence au folklore anglais. Il nous laisse ici
deux chansons anglaises pleines d’atmosphère On the idle hill of summer et Loveliest of trees. C’est le moment de citer ici un compositeur australien qui lui aussi sera tué dans la terrible bataille de la Somme. Il s’agit de Frederick Septimus Kelly, qui, présent ici avec un song : Shall I Compare Thee ?, laisse à la postérité une Sonate pour violon et piano, des petites pièces pour orgue ainsi qu’une Elegy pour harpe et cordes. C’est ici que se place la joyeuse, confiante et généreuse chanson de Gabriel Fauré C’est la paix op.114, célébrant la victoire chèrement obtenue. L’auteur du Requiem y déploie une sincérité et une joie communicatives, proches de l’exubérance. Ernest Farrar est tué le 18 septembre dans la bataille d’Epehy Ronssoy (Somme) alors qu’il n’est présent sur ce front que depuis  deux jours. Il figure sur ce CD avec Trois pièces assez brèves pour le piano : menuet, lullaby et caprice écrites avec une pointe d’humour et beaucoup d’élégance. André Devaere  représente ici la Belgique. Il meurt au début du conflit le 14 novembre 1914. Nous pouvons découvrir ici sa mélodie La Flûte amère de l’automne op.1 qui ne reste guère éloignée d’un certain esprit fauréen et révèle une très grande sensibilité et une émotion sincères. A présent ce CD nous permet de faire la connaissance d’un authentique talent que la guerre voit disparaître en 1915.Il s’agit du compositeur allemand Rudi Stephan dont deux lieder figurent ici : Pappel im Strahl et Heimat , d’une écriture très personnelle dégagée de l’influence de Brahms et de Strauss. Bien que décédé à l’âge seulement de vingt-huit ans, Rudi Stephan laisse derrière lui un catalogue d’œuvres impressionnant comprenant non seulement de la musique de chambre mais aussi des pièces pour orchestre (Musique pour orchestre No1, Musique pour orchestre No2 et surtout un opéra datant de 1914 : Les premiers hommes). Claude Debussy est présent ici avec un véhément et enflammé Noël des enfants qui n’ont plus de maison, qui sera suivi d’une très mélancolique mélodie de Reynaldo Hahn : Le plus beau présent. Erwin Schulhoff disparaît en 1942 après avoir été déporté dans un camp de concentration. Il avait auparavant participé au premier conflit mondial dans l’armée autrichienne en particulier dans les Dolomites. Il eut l’insigne honneur d’être remarqué par Antonin Dvorak qui  détecta ses  dons de compositeur. Max Reger l’initia à la composition, et très tôt, Erwin Schulhoff fut attiré par une forme alors nouvelle de la musique : le jazz, discipline musicale qui ne laissa pas non plus indifférent un certain Maurice Ravel. Erwin Schulhoff est présent dans ce CD avec 3 des 5 Gesänge op.39. Ainsi ce CD démontre avec prodigalité qu’aux pires moments de leur vie (puisque certaines de ces œuvres furent composées au front) des soldats participant à ce premier conflit mondial surent trouver en eux les ressources leur permettant  de composer, mélodies, songs et lieder !
C’est  le baryton Marc Mauillon qui est l’interprète de ce CD. Sa prestation est remarquable évidemment dans le domaine français (Ravel, Debussy, Fauré) mais il surmonte aussi avec beaucoup d’aisance les difficultés induites par les lieder (allemands) et les songs (anglais).C’est  à Anne Le Bozec qu’incombe la tâche délicate d’accompagner sur un piano Bechstein  ces mélodies, lieder et songs. Elle y révèle un talent véritable, s’employant à recréer avec talent chacun de ces climats musicaux.

texte de Michel Jakubowicz

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