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Festival de musique baroque - La Chabotterie (Vendée) - le 7 août

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© Photo Accent Tonique

C’est la Simphonie du Marais, de Hugo Reyne, qui concluait la seizième édition du festival de musique baroque de La Chabotterie, en Vendée. Pour jouer, vous ne devinerez jamais quoi, mais oui, l’opéra Le Devin de village, en fait, un intermède en un acte, de Jean-Jacques Rousseau. Eh oui, on l’a appris en passant, au lycée, en faisant nos humanités, comme on disait du temps où existaient des bacs philo, sciencex et mathélem’ (je vous parle d’un temps que les moins de vingt ans, etc).

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On l’a appris, que Jean-Jacques le Philosophe avait écrit de la musique, c’est vrai, mais on l’a oublié. Et ça ne vous vient pas immédiatement à l’esprit. C’est pareil pour Jean-Paul Sartre, Paul Vaillant-Couturier, Françoise Sagan ou Marcel Aymé en paroliers de chansons, on le sait, mais ce n’est pas ça qui les caractérise. Ce soir, il s’agissait donc du Devin de village, de Jean-Jacques Rousseau, paroles et musique, car il a tout écrit dans cette version jouée par la Simphonie du Marais, les solistes du Marais, le choeur du Marais et trois danseurs du ballet de Vendée, sous la direction de Hugo Reyne.
Hormis le tricentenaire de l’auteur de l’Emile, pourquoi Hugo Reyne, cet amoureux de la musique française, a-t-il choisi précisément celui qui s’est le plus nettement opposé à elle ? Hugo Reyne s’en est expliqué, pendant les Confidences baroques qui précèdent les concerts à la Chabotterie. Jean-Jacques Rousseau, a-t-il montré, n’a pas trop apprécié que son Devin de village ait été monté dans une mise en scène, devant Louis XV peut-être, mais avec un librettiste différent de lui. D’autre part, il a vraisemblablement subi une critique de Jean-Philippe Rameau, alors en pleine gloire, ce qui aurait suffi à Jean-Jacques le Susceptible pour prendre le parti de la musique italienne. Ce qui colle assez bien au personnage ombrageux et chatouilleux qu’il était.

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© Photo Accent Tonique

Le sujet de cette pastorale curieusement construite est la réconciliation, « grâce » à un devin de village, en réalité un charlatan rigoureusement inutile, de deux amoureux fâchés qui ne songent qu’à se rabibocher. J’ai écrit « curieusement construite » car le dénouement se réalise presque à la moitié de la pièce et la seconde partie, c’est de la broderie sur le sujet, avec des chants et des danses. Certes, cet opéra ne se compare sans doute pas au Don Giovanni de Mozart, mais il est simple, ce que voulait Rousseau, révolutionnaire en ce qu’il quittait le terrain de la mythologie et des grands pour parler des gens ordinaires, moral et sans duplicité (excepté pour le pseudo-Devin), bref, rousseauiste. Le baryton Arnaud Marzorati dans le rôle titre est excellent, en surjouant comme il le fait son personnage, le ténor Mathias Vidal est également très bon ainsi que la soprano Leonor Leprêtre, sa voix s’affirmant de plus en plus au cours du concert. Le chœur du Marais, trois sopranos, trois basses, deux contre-ténors, deux ténors, est remarquable, tout ce qu’il chante est parfaitement compréhensible et audible, la musique simple de Rousseau ne posant pas d’obstacle majeur. Quant à la Simphonie du Marais (cinq violons, un alto, deux violoncelles, une contrebasse, un clavecin, deux hautbois et un basson, alternant avec la flûte), c’est un orchestre baroque de tout premier ordre, jouant cette musique française (quoi qu’en dise Jean-Jacques Rousseau) avec beaucoup de cœur. Les costumes sont parfaitement dans l’esprit de Rousseau et le décor que fournit le logis de  La Chabotterie à la mise en espace de Hugo Reyne, y compris les hirondelles qui l’habitent convient pleinement à ce spectacle bucolique. Quant à Hugo Reyne, le maître d’œuvre de ce Devin de village, sa passion pour la musique baroque déborde de chacun de ses gestes, et également son humour, ses convictions esthétiques et ses talents de musicologue. Il réussit à faire de cet intermède charmant, sans plus, qu’est le Devin de village, un moment de grâce rare, une plongée impeccable dans un monde trois fois centenaire dont nous sommes les héritiers.

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