CD : "Lamentevole" Sonates et pièces pour violon tchèques

Heinrich Ignaz von Biber : Arien 1- 4. Sonata Violino Solo. Georg Muffat : Sonate Violino Solo. Antonio Bertali : Giacona en do majeur. Alessandro Poglietti : Sonate pour violon et viole de gambe. Heinrich Döbel : Sonata N° 2 . Johann Heinrich Schmelzer : Sonata ''Lementevole''
Ensemble Castelkorn, Josf Žák, violon et direction
1CD Eloquentia : EL1755 (Distribution : Socadisc)
Durée du CD : 71'25
Note technique : (5/5)

Le programme de ce CD offre un panorama exhaustif d'œuvres tirées du fonds musical de la ville de Kroměříž, en Bohème, qui trouva son apogée grâce au Prince-évêque Carl Lichtenstein-Caslelkorn à partir de 1664. Autrement dit la splendeur du baroque tchèque de la seconde moitié du XVII ème siècle, et l'âge d'or du violon.

On doit au violoniste Josef Žák la redécouverte de ce pan méconnu de la musique baroque tchèque. Le fonds dont s'agit recèle de multiples compositions centrées sur le violon, leurs auteurs les soumettant à l'évêque musicien pour se faire connaître, souvent en vue d'obtenir le poste convoité de maître de chapelle à la Chapelle épiscopale. Ainsi de Ignaz Biber (1644-1704) qui occupa cette fonction de 1668 à 1670. Dans sa Sonata Violino Solo, des années 1670, sa plus ancienne composition pour violon seul, il propose un traitement déclamatoire de la partie soliste sur une basse obstinée, fonctionnant telle une série de variations avec des traits appuyés, presque excentriques. La Sonate Violino solo de Georg Muffat (1653-1704), inspirée des styles français et italien, montre un violon virtuose avec des modulations étranges entre majeur et mineur, à l'adagio central en particulier. Le schéma est celui d'une suite enchaînée de mouvements lent-vif-lent-vif. A signaler encore une partie de clavecin très travaillée. La Giacona en do majeur d'Antonio Bertali (1605-1669) est d'une grande richesse harmonique dans le traitement soliste, les modulations évoluant de manière de plus en plus complexe tandis que le rythme s'emballe ou ralentit. On remarque là encore d'étranges modulations. La Sonate N° 2 du violoniste polonais Heinrich Döbel (1651-1693) étale une extrême virtuosité instrumentale avec emploi de l'ostinato.

Une autre préoccupation du Prince, devenu archevêque, était de favoriser le rapprochement avec les musiciens de la cour impériale de Vienne. Alessandro Poglietti (1641-1683), organiste de la cour de Léopold Ier, est ce ceux-là. L'ornementation est reine dans sa Sonate pour violon et viole de gambe. De même en est-il de Johann Heinrich Schmelzer (1623-1680), violoniste à la cour. La Sonate

« Lamentevole » (lamentable) propose un vaste lamento, même si la section médiane assez rythmée fait contraste. Cette pièce plus tardive marque une nette évolution de la technique violonistique. La sonorité pleine et chaude du violon baroque de Josef Žák pare ces pièces d'une aura de séduction immédiate et la qualité de jeu de ses trois confrères, Julie Dessaint à la viole de gambe, Felipe Guerra, clavecin et orgue, et Ulrik Gaston Larsen, théorbe et guitare, contribue à la réussite de cet album.

La prise de son dans l'église de Vižňov (République Tchèque) est flatteuse, parfaitement ''atmosphérique'' avec une belle spatialisation des instruments et une impressionnante résonance dans le grave.

Texte de Jean-Pierre Robert

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