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  • Jean-Pierre Robert
  • Musique

CD : Les Nocturnes de Chopin par François Dumont

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Frédéric Chopin : 21 Nocturnes
François Dumont, piano
2CDs Aevea / On Classical : AE 17044 (Distribution : Socadisc) http://www.aevea.it/
Durée de CDs : 59'29+44'16
Note technique : etoile bleueetoile bleueetoile bleueetoile bleueetoile bleue (5/5)

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Dans un répertoire très fréquenté, celui des Nocturnes de Chopin, le pianiste François Dumont rejoint les plus grands. De cet ensemble essentiel de la musique du compositeur, il donne une vision d'une rare cohérence. Si le genre pianistique du nocturne a été inventé par l'irlandais John Field au XIX siècle, c'est nul doute Frédéric Chopin qui lui a donné ses lettres de noblesse : au charme mélodique que permet l'arabesque pianistique, le polonais ajoute d'emblée une nouvelle dimension par une invention sans cesse renouvelée. Ce qui était musique de salon atteint l'expressivité d'un tableau évocateur.

Chopin a écrit ce type de pièces tout au long de sa vie créatrice, de 1827 à 1846, par groupes de trois puis de deux, et dans un cheminement vers une construction toujours plus élaborée. L'ensemble est constitué de dix huit pièces, outre trois à titre posthume, qui sont des œuvres de jeunesse. Elles sont réunies ici dans l'édition nationale polonaise due à Jan Ekier établie en 2008. La facture de chacune est tripartite (à l'exception de l'op 15 n° 3), selon le schéma ABA, la section médiane apportant un contraste souvent plus dramatique.

Après trois pièces en forme d'essai - dont le Nocturne en ut dièse mineur op. posthume est cependant passé à la postérité - ce sont les pièces de l'op. 9 qui établissent les contours du nocturne chopinien : une mélodie proche du chant, ornementée comme du bel canto bellinien, qui se teinte de mélancolie à travers un dessin sinueux. Ces caractéristiques perdurent dans les trois volets de l'op. 15, où la rêverie est toujours l'essentiel, qui se cale sur la cantilène. Avec les deux Nocturnes op. 27, le phrasé se fait plus recherché. Les séries de l'op. 32 et de l'op. 37 apparaissent plus conventionnelles, Chopin semblant revenir à la pure romance conçue par Field, même si çà et là il surprend par des tournures séduisantes. Mais c'est avec les Nocturnes de l'op. 48 (1841) que l'évolution est la plus significative. A savoir un élargissement du propos vers quelque dramatisme, pour ce qu'on a appelé le ''nocturne-récitatif''. Par exemple par l'introduction d'un rythme de marche qui s'amplifie (n° 1), ou un mélange de plainte – le « zal » polonais - et d'affirmation par une série d'accords autoritaires (n° 2). Avec l'op.55, écrit à Nohant à l'été 1844, les choses évoluent encore : drame sous-jacent sous la simplicité mélodique, épanchement plus intérieur dans ce qui est un des bons exemples du style tardif de Chopin. Ce qui se confirme dans les deux pièces de l'op. 62 : style polyphonique et construction rythmique complexe, toujours sous une apparente simplicité de la mélodie. 

Peut-être plus que dans les autres œuvres de Chopin, le nocturne laisse une marge de liberté à l'interprète. Le cadre ornemental le favorise. Comme le fait que ce type de pièce présente aussi un caractère protéiforme, telle se rapprochant de la ballade, telle autre de la barcarolle. Ce qui frappe dans les interprétations de François Dumont, c'est d'abord la souplesse du phrasé et le refus de l'effet. Un intimisme de bon aloi, comme le montrait son récital à Gaveau il y a peu. On est proche souvent d'une sorte d'improvisation. Une délicatesse du toucher ensuite, qui évite l'alanguissement. Non qu'il mésestime l'énergie, mais celle-ci reste parfaitement canalisée, refus de l'excès virtuose et de la brillance. Dès lors, l'intériorité, le rêve, l'émotion affleurent naturellement. L'extrême clarté enfin pour faire saillir le lyrisme fondamental de ces morceaux, et un travail fouillé sur la dynamique, depuis des pianissimos envoûtants jusqu'à des orages grandioses et contrôlés dans les épisodes médians. Et toujours un usage modéré de la pédale pour créer le juste climat et tout un kaléidoscope de couleurs. Au final, un clacissisme qui ne cherche pas à tirer ces pièces vers le romantisme échevelé.

La prise de son offre une atmosphère chambriste, en adéquation avec le caractère intimiste de l'exécution. Bien centré dans l'image sonore, l'instrument est saisi avec naturel dans ses divers registres.

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Texte de Jean-Pierre Robert

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