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  • Jean-Pierre Robert
  • Musique

CD : Renaud Capuçon joue les concertos pour violon de Bartók

Violin Concertos

Béla Bartók : Concerto pour violon N° 1. Concerto pour violon N° 2.
Renaud Capuçon, violon. London Symphony Orchestra, dir. François-Xavier Roth
1 CD Erato : 0190295708078 (Distribution : Warner classics)
Durée du CD : 60'11
Note technique : etoile bleueetoile bleueetoile bleueetoile bleueetoile grise (4/5)

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Il est  assez rare d'associer au disque les deux concertos pour violon de Béla Bartók. Ce CD est l'occasion de plusieurs premières : début de Renaud Capuçon dans ce répertoire, qu'il s'était promis d'investiguer après avoir joué la Sonate N° 1 pour violon et piano avec Martha Argerich, premier partenariat au disque avec le LSO, enfin collaboration inaugurale discographique entre l'orchestre et son chef associé François-Xavier Roth. Le résultat est au niveau de attentes.

Les deux concertos de violon se situent aux deux extrêmes de la carrière de Béla Bartók. Si le Premier concerto pour violon et orchestre a longtemps été éclipsé par la popularité du suivant, il n'en est pas moins un bon exemple de la première manière du compositeur. Il a connu un sort curieux puisque composé en 1907/1908, sa dédicataire, la violoniste Stefi Geyer dont le musicien était éperdument épris, refusera de le créer. Tombé ensuite dans l'oubli, ce n'est qu'en 1958 que Paul Sacher en fera donner la première audition. Il est constitué de deux mouvements, dont Stefi Geyer dira qu'il s'agit de « deux portraits, le premier est la jeune fille, dont il est amoureux, le second la violoniste, qu'il admire ». Le concerto débute par un andante sostenuto et même par la mélodie intense du seul violon, associée à un motif-Leitmotiv dit « de Stefi », dont le lyrisme s'amplifie au fur et à mesure de l'entrée des divers groupes d'instruments de l'orchestre. Sur le versant chantant, le mouvement contient des pages aériennes jusqu'à une fin extatique, d'une poésie émue. L'allegro giocoso contraste par le côté démonstratif de la partie soliste et ses audaces harmoniques et rythmiques, ses dissonances même, coutumières du Bartók de cette période. Le tempo fluctue constamment. Quelque thème populaire égaie le mouvement, comme un original dialogue entre le soliste et les bois dans un épisode mordant. Renaud Capuçon en livre une interprétation très pensée.

Dédié à Zoltán Székely, alors premier violon de l'Orchestre du Cencertgebouw, qui le créera en mars 1939 sous la direction de Willhelm Mengelberg, le Deuxième concerto pour violon et orchestre est d'une toute autre envergure, ce qui l'inscrit au nombre des grandes partitions pour l'instrument du XX ème siècle, et même de tout le répertoire violonistique. Contemporaine de Musique pour cordes, percussions et célesta et de la Sonate pour deux pianos et percussions, l'œuvre se singularise par sa grande inventivité et ses trouvailles instrumentales, notamment aux percussions et à la harpe. Elle marque un tournant dans l'écriture de Bartók vers un langage somme toute plus abordable. Respectant la forme en trois mouvements, le concerto débute par un allegro ma non troppo qui assigne au violon soliste une partie extrêmement tendue. Deux thèmes se le partagent, l'un lyrique et allant, confié au soliste, l'autre résolu sur une série de douze sons, mais habilement traitée non dodécaphonique  contrairement à façon de la II ème École de Vienne. Le mouvement est traversé d'épisodes mystérieux avec des relents de musique populaire, et l'irruption de grands climax des cuivres. Le développement est conséquent, aux multiples rebondissements, précédant une cadence acrobatique et une coda fière très syncopée. L'andante tranquillo, bâti sur le schéma thème et variations, livre un thème simple et élégiaque, d'une fascinante beauté, suivi de sept variations, modèles de raffinement orchestral et d'un subtil travail sur les métamorphoses du thème. Le violon y est traité avec mille nuances, de la douceur à l'éclat, de la tendre mélodie au trépignement. La 6 ème variation, par exemple, associe les figures décoratives du violon à un accompagnement de la timbale et de la caisse claire. Là encore, la parenté avec les deux œuvres contemporaines consacrées aux percussions est évidente en termes d'énergie et de séduction sonore. Le concerto s'achève sur un allegro molto qui se calque sur la matière du premier mouvement, mais habilement transformée.

Tout comme pour le Premier concerto, Renaud Capuçon adopte ici un ton très intériorisé quel que soit le registre, se refusant à la recherche de l'effet dans les passages contrastés de tension de l'instrument dans le haut du registre. Le contraire d'une approche qui ne serait que brillance. La dextérité est telle qu'elle semble abolir la difficulté, pourtant bien présente au long de ces pages bardées de ruptures de rythmes et où le souci des proportions demeure primordial. Comme toujours chez le violoniste français, on admire la limpidité, la fraîcheur sonore. Au service d'une palette promouvant des nuances dynamiques d'une grande cohérence et combien maîtrisées : douceur de l'extrême ''piano'', projection d'aigus raffinés, absence de toute dureté dans le ''forte''. François-Xavier Roth ménage avec doigté la diversité de climats et de rythmes et autres effets grinçants. A concerto inspiré, orchestre virtuose : le LSO brille de tous ses pupitres, particulièrement ceux des bois et des percussions.

L'enregistrement effectué à la St Lukes Church au Barbican de Londres, est eu égard à une acoustique sèche, quelque peu compact sur l'orchestre. La balance soliste-orchestre est satisfaisante.

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Jean-Pierre Robert

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