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  • Jean-Pierre Robert
  • Musique

CD : «Lettera amorosa», une anthologie de pièces «à voix seule» de Monteverdi

Monteverdi Lettera Amorosa

  • Claudio Monteverdi : «Lettera amorosa», «Lamento d'Arianna», «Lamento della Ninfa», Monologue d'Ottavia (L'incoronazione di Poppea), Couplets de La Musica (Prologue de l'Orfeo), et autres pièces
  • Mariana Flores, soprano
  • avec : Julie Roset, soprano, Valerio Contaldo & Mathias Vidal, ténors, Philippe Favette, basse
  • Cappella Mediterranea, Leonardo García Alarcón, clavecin, épinette, orgue et direction

  • 1 CD Ricercar : RIC 390 (Distribution : Outhere music)
  • Durée du CD : 65 min 20 s
  • Note technique : etoile orangeetoile orangeetoile orangeetoile orangeetoile orange (5/5)

Leonardo García Alarcón et son ensemble de la Cappella Mediterranea ainsi que la soprano Mariana Flores proposent un récital Monteverdi centré sur un répertoire spécifique dit «a voce sola». Ces morceaux pour voix seule qui apparaissent chez le musicien à partir du Cinquième Livre de Madrigaux (1605), marquent le sommet de la monodie accompagnée. Le présent programme le décline à travers un florilège de morceaux significatifs, tout en montrant l'évolution de Monteverdi vers un style de plus en plus théâtral et polyphonique.

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Le genre «a voce sola» trouve un de ses plus beaux exemples dans Le Lamento d'Arianna (1608), extrait du VIème Livre de Madrigaux. Le ''lamento'' qui se situe entre récitatif et aria, permet l'expression d'une extrême diversité d'affects chez un musicien qui s'intéresse d'abord à la psychologie de ses personnages. Car c'est à partir du texte que s'organise la musique et ses changements d'harmonie souvent abrupts : ici, la plainte déchirante de la jeune femme, les invocations aux éléments pour engloutir le vaisseau de Thésée, l'évocation attendrie de ses parents, jusqu'au cri de douleur à la pensée de la perte irrémédiable de Thésée. Dans la «Lettera amorosa», extraite du VIIème Livre de Madrigaux, la bien-aimée qui reçoit une lettre d'amour de l'amant, la lit dans une mélodie quasi parlée s'approchant de l'arioso. À l'interprète est laissée la liberté de choix des moyens expressifs : en fait, l'aptitude à créer un vaste florilège d'expressions au service du texte, souvent dans un subtil clair-obscur. On en a un autre exemple au prologue d'Orfeo, avec les couplets de «La Musica» où l'interprète détaille quelques mots significatifs à l'envi avec des variations d'accents et de rythmiques.

On remarque une évolution avec le Lamento della Ninfa (VIIIème Livre, 1638) qui appartient au genre des pièces dites représentatives, c'est-à-dire appelant l'aspect théâtral : un groupe de trois chanteurs (deux ténors, une basse) annoncent l'arrivée de la nymphe et concluent la scène. Au centre, l'aria qui se développe sur un discret accompagnement des autres voix, progresse de manière changeante, voire imprévisible dans une grande intensité dramatique, plus travaillée encore que dans le récitatif dramatique d'Ariane. Enfin, le monologue d'Ottavia de l'Incoronazione di Poppea (1643) offre un nouveau style théâtral, vers une expression plus exacerbée, vive et contrastée. L'impératrice répudiée hurle sa colère contre Néron qu'elle aime encore passionnément et épanche sa plainte sur son propre sort dans un saisissant contraste entre emportement et abattement. Quelques autres pièces complètent cette anthologie dont «Voglio di vita uscir» (Je veux quitter cette vie) évoquant la déception amoureuse, sur une rythmique animée et des vocalises virtuoses.

La soprano argentine Mariana Flores qu'on a pu applaudir dans la production d'Eliogabalo de Francesco Cavalli au Palais Garnier, a déjà à son actif une pléiade de disques remarqués. Son interprétation est enthousiasmante par la pureté du timbre, le sens inné du texte et l'art consommé de la nuance, depuis l'éclat jusqu'à des pianissimos où la voix meurt dans un souffle. Leonardo García Alarcón montre qu'il est bien l'un des meilleurs avocats de cette musique tant par les choix d'instrumentation (théorbe, archiluth ou chitarrone, harpe, basse de viole, violon, et clavecin, épinette à cordes de boyau ou orgue) que par la conviction qu'il apporte au soutien des musiciens émérites de la Cappella Mediterranea.

Joliment réverbérée, mais sans excès, la prise de son est d'un beau relief. 

Texte de Jean-Pierre Robert

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Disponible sur Amazon en CD et MP3



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