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  • Jean-Pierre Robert
  • Musique

CD : Le Stabat Mater de Pergolèse revisité

Pergolesi Stabat Mater

  • Giovanni Battista Pergolesi : Stabat Mater, P77
  • Nicola Porpora : Salve Regina pour soprano
  • Leonardo Leo : Beatus vir pour alto
  • Sandrine Piau (soprano), Christopher Lowrey (contre-ténor)
  • Les Talens lyriques, dir. Christophe Rousset
  • 1 CD Alpha : Alpha 449 (Distribution : Outhere Music)
  • Durée du CD : 66 min 11 s
  • Note technique : etoile rougeetoile rougeetoile rougeetoile rougeetoile rouge (5/5)

Ce disque est plus qu'une nouvelle et énième version du célébrissime Stabat Mater de Pergolèse. Car il le met en perspective avec d'autres pièces vocales contemporaines, de Porpora et de Leo, portant ainsi le projecteur sur les splendeurs de la musique sacrée napolitaine du XVIIIème siècle. Dans des interprétations justement habitées d'une rigueur et d'une musicalité d'exception. 

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Composé en 1736, peu avant sa mort précoce, le Stabat Mater de Giovanni Battista Pergolesi prend pour modèle celui d'Alessandro Scarlatti, de 1724, dont il possède les mêmes caractéristiques : deux voix de castrats soprano et alto, un petit ensemble de cordes et continuo. C'est une cantate distribuant ses 12 séquences en sept duos, deux arias pour soprano et trois confiées à l'alto. Pour sa seconde version au disque, Christophe Rousset a choisi d'unir la voix de soprano et celle de contre-ténor : après Barbara Bonney, Sandrine Piau, Christopher Lowrey succédant à Andreas Scholl (Decca). L'interprétation est proche des sources, se refusant aux grands effets : une vision sereine, intense, d'une presque légèreté sonore, différenciant les tempos souvent de manière sensible. Ainsi du début de l'œuvre et son verset ''Stabat mater dolorosa'' pris lent avec ferveur, ou au contraire de la manière alerte de ''fac ut ardeat cor meum'', d'une vivacité presque opératique. C'est que, comme le souligne Rousset, il y a là « une expression de la pitié très méridionale, très épicée, où l'on passe des pleurs aux rires assez rapidement ». Si l'œuvre véhicule d'abord tristesse et affliction, celles des douleurs de la Vierge Marie, elle n'en distille pas moins encore joie et lumière. Et cette dramaturgie interne peut à certains moments la rapprocher de l'opéra, toutes proportions gardées bien sûr. L'approche de Christophe Rousset est rigoureuse : recours à une petite formation de 16 cordes et un clavecin, dont un continuo de deux parties, cello et orgue. Ce qui permet une transparence du discours musical, souvent proche de l'épure, une élasticité aussi du phrasé par le contraste dans la dynamique et le rythme. Le tempo est confortable, presque dansant, ou au contraire fluide dans les pages rapides, et le silence est marqué après les points d'orgue. Ce qui est magnifié par la finesse d'exécution des instrumentistes des Talens lyriques.  

Le chef favorise chez ses chanteurs un usage modéré du vibrato et des accents discrets dans le registre de l'affliction. Mais ailleurs des vocalises assurées et détachées qui effectivement ''épicent'' le chef-d'œuvre de Pergolèse. Les deux voix s'unissent parfaitement. C'est, on le sait, une des joies de cette œuvre que de marier les deux timbres dans des unissons envoûtants. Son histoire au disque en a donné de fameux exemples : outre la paire déjà citée, les voix magiques de Mirella Freni et de Teresa Berganza (DG), ou plus récemment de Julia Lezhneva et de Philippe Jaroussky (Erato). Les présents interprètes ne font pas exception. Sandrine Piau offre l'immense talent qu'on lui connaît dans le répertoire baroque, fait de retenue, d'envolées aiguës éthérées et d'intensité dans la diction. Le jeune Christopher Lowrey est assurément sur les traces de ses aînés et collègues du moment grâce à un timbre agréable bien projeté et une ligne fluide élégante.

Les deux autres pièces du programme forment un original et intéressant complément. Le Salve Regina de Nicola Porpora est une petite cantate en six parties pour soprano solo où triomphe la mélodie cantabile napolitaine. Ainsi de l'entame ornée de douces vocalises. Là encore sections vives et lentes alternent, certaines proches du style opératique comme le verset ''Ad te clamamus'', bâti sur un rythme de tarentelle, ou le vif et presque dansant ''Eia ergo''. D'autres séquences sont plus intimes et retenues comme l'ultime ''O clemens'', beau salut à la clémente, bienveillante et douce Marie. Autre représentant majeur de la musique à Naples au XVIIIème, Leonardo Leo a composé de la musique religieuse à côté de ses nombreux opéras. Tiré du Psaume 111, le Beatus vir, pour voix d'alto, est lui aussi en six parties pour glorifier l'homme qui craint Dieu. Là également la vocalité est typique de celle pratiquée par les auteurs napolitains, avec des vocalises très travaillées. Tempos vifs et lents se succèdent dans une écriture rythmique sophistiquée. Christopher Lowrey en donne une lecture brillante par sa technique agile et précise.

L'enregistrement, à l'Église Notre Dame d'Auvers-sur-Oise, est intimiste, tout à fait en adéquation avec la conception recueillie de Rousset. L'équilibre voix-orchestre est tout à fait réussi comme la définition instrumentale.

Texte de Jean-Pierre Robert    

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