CD : Les Essentiels ON-Mag - Vents en chambre de Beethoven
Depuis le confinement, la rubrique CD s’ouvre chaque vendredi à des disques déjà parus que la revue considère comme indispensables pour leur qualité musicale et technique.
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- ''Les Vents Français interprètent Beethoven''
- Trio op.87 pour hautbois, clarinette et basson. Trio WoO 37 pour piano et basson. Variations sur ''Là ci darem la mano'', WoO 28. Sonate pour piano et cor op.17. Duo pour clarinette et basson, WoO 27 N°3
- Emmanuel Pahud (flûte), François Leleux (hautbois), Paul Meyer (clarinette), Radovan Vlatković (cor), Gilbert Audin (basson)
- Éric Le Sage, piano.
- 1 CD Warner : 0190295919566 (Distribution : Warner Music)
- Durée du CD : 79 min 43 s
- Parution : Mars 2017
- Note technique : (5/5)
Ce disque au minutage généreux met en lumière un pan méconnu de la musique de chambre de Beethoven : ses œuvres pour instruments à vents. Elles sont interprétées par Les Vents Français, un ensemble de cinq musiciens aussi européens qu'exclusivement galliques, toujours soucieux d'aborder des territoires peu labourés. Des moments d'écoute pour le moins originale et l'occasion de redécouvrir des pièces rarement jouées.
Ces pièces appartiennent aux années de jeunesse de Beethoven, partagées entre Bonn et Vienne. Le compositeur était alors influencé par la musique d'harmonie si en vogue à l'époque. Il bénéficiait des conseils de Joseph Haydn et était impressionné par la virtuosité de musiciens tels le clarinettiste Anton Stadler, le corniste Jan Vaclav Stich, dit Giovanni Punto, ou encore les hautboïstes Johann, Franz et Philipp Teimer. Le Trio WoO 37 pour piano, flûte et basson, qui remonte à 1786 – Beethoven a seize ans - mais publié posthume, voit le clavier mener la danse quoique l'écriture pour les deux bois soit habile, en particulier le joyeux babil de la flûte dans l'Allegro initial. Au fil d'un Adagio mélancolique, flûte et basson se partagent la mélodie tandis que le piano renforce ce dialogue original. Le finale, enchaîné après une belle pirouette de la flûte, offre la première série de variations composées par Beethoven : un thème clair ouvre la voie à sept variations mettant en valeur l'un ou l'autre des trois partenaires avant qu'ils ne s'unissent dans la dernière pour une fin en apothéose. Le Trio op.87, de 1795, originellement pour deux hautbois et cor anglais, joué ici dans la transcription de John P. Newhill pour hautbois, clarinette et basson, montre une inédite et séduisante association des trois timbres. En particulier au long du bel Adagio cantabile et du Menuetto, plus scherzo que menuet d'ailleurs, vraiment pétillant, tandis qu'un alerte Presto conclut ce qui demeure un merveilleux divertissement.
La Sonate pour piano et cor op.17 a été créée en 1800 par l'auteur et Giovanni Punto, pour qui elle avait été écrite. Elle exploite la technique éprouvée du fameux corniste, notamment dans le registre grave. C'est particulièrement significatif aux premier et dernier mouvements. Mais la partie de piano n'est pas moins magistrale. Au milieu, un bref et poignant Poco adagio nimbe la pièce d'un instant de grâce. Enfin, les Variations WoO 28, sur ''Là ci darem la mano'', le duo Zerlina-Don Giovanni de l'opéra de Mozart, conçues pour trois hautbois, et seulement publiées en 1914, sont ici jouées dans un arrangement de Fritz Stein pour hautbois, clarinette et basson. Ce qui leur donne une tonalité haute en couleurs. Si le thème est lent, les huit variations sont plutôt sur le versant vif, sauf la cinquième. Elles sont d'une belle fraîcheur dans cet arrangement et surtout au regard de la présente interprétation.
C'est qu'ici, comme dans toutes les autres pièces du programme, Les Vents Français montrent une élégance vraiment gallique : limpidité et finesse sonore, musicalité transcendant toute virtuosité, et pourtant une aura baignant chaque pièce. Surtout, la symbiose est totale entre eux. L'énoncé de ces cinq noms prestigieux, solistes internationalement reconnus, en dit long : Emmanuel Pahud, flûte, premier pupitre au Berliner Philharmoniker, François Leleux, hautbois, qui mène la belle carrière que l'on sait, Paul Meyer, clarinette, premier solo à 18 ans de l'Orchestre de l'Opéra de Lyon, puis de l'Opéra de Paris, Gilbert Audin, basson, qui fut lui aussi solo à l'Opéra de Paris et est professeur au CNSMDP, et le croate Radovan Vlatković cor, 1er Prix à l'ARD de Munich et l'un des fins représentants de l'école de cuivres d'Europe centrale. Le pianiste Éric Le Sage, leur partenaire attitré, donne ici plus qu'une simple réplique. Rafraîchissant !
La Prise de son, dans les studios Bavaria de Munich, est joliment aérée, comme il convient à cette musique conçue pour être jouée dehors.
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Texte de Jean-Pierre Robert
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