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  • Jean-Pierre Robert
  • Musique

CD : Le Printemps de Claude Lejeune

ClaudeLejeune LePrintemps

  • Claude Lejeune : Le Printemps, oratorio (extraits)
  • Ensemble Gilles Binchois, dir. Dominique Vellard
  • 1 CD Evidence classics : EVCD 069 (Distribution : PIAS)
  • Durée du CD : 64 min 14 s
  • Note technique : etoile verteetoile verteetoile verteetoile verteetoile verte (5/5) 

Pour leur nouveau CD sous label Evidence, l'ensemble vocal Gilles Binchois se tourne vers un corpus essentiel du XVIème siècle, Le Printemps de Claude Lejeune. Il en propose une sélection significative, honorant un recueil admiré par bien des successeurs du musicien, dont Olivier Messiaen qui le considérait comme l'un des plus grands chefs-d’œuvre de l'histoire de la musique. L'interprétation est d'une beauté plastique à couper le souffle.

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Claude Le Jeune dit Lejeune (c. 1530-1600) compose dans ses dernières années son Grand Œuvre Le Printemps, recueil de 39 pièces vocales ou ''airs mesurés à l'antique'', qui ne sera publié posthume qu'en 1603. Ce corpus doit beaucoup à l'Académie de poésie et de musique fondée en 1570 par Antoine de Baïf et dont Lejeune était l'une des figures majeures. L'écriture de ces airs dits mesurés est toute de clarté et d'équilibre des voix de dessus et de basses, et requiert agilité et flexibilité de la part de ses interprètes pour en restituer aussi l'audace d'écriture. Celle-ci s'inscrit dans une nouvelle esthétique qui verra le jour au XVIIème, celle de l'air dit de cour. Chaque air à une, deux ou quatre voix, possède un caractère spécifique, ce qui concourt à la grande diversité de l'ensemble et compose une mosaïque chatoyante. La légèreté de l’accompagnement de luth ou de clavecin ajoute au sentiment de transparence. Les sujets traités sont la célébration de la femme et de l'amour courtois, à travers un langage métaphorique empruntant au figuralisme de la nature, paysages, oiseaux, etc... Ce qui ressort de la sélection opérée par l'Ensemble Gilles Binchois qui propose 14 titres fort différents d'airs et de chansons épousant le rythme de la langue française de l'époque et chantés en vieux français.

Les airs avec accompagnement de luth ou de clavecin, voire de harpe, alternent le ''chant'' (soliste) et le ''rechant'' (de l'ensemble des voix prévues, à 2 ou 4, ou plus). Ainsi de ''La bel' aronde'' qui voit se succéder rechant-chant-rechant-chant-rechant. ''Le chant du Rossignol'', composition due à Lejeune et Clément Jannequin, en six parties, s'inspire de la polyphonie de Lejeune, à laquelle est ajoutée une 5ème voix, ce qui en renforce la richesse polyphonique. Les diverses parties se distinguent les unes des autres par leur rythmique souvent légèrement scandée (2 & 3) ou au contraire d'un doux lyrisme (4) ou encore faisant intervenir une voix soliste de soprano (5). La dernière le fait de l'ensemble des 5 solistes. L'air strophique à 4 voix ''Quiconq' l'amour noma l'amour'' est une chanson populaire. La dernière pièce du disque ''Amour, quand fus-tu né ?'', parodie d'un madrigal d'Adrien Willaert, est un hommage à la musique italienne de l'époque : une adaptation osée d'un dialogue madrigalesque à 7 voix d'une étonnante opulence polyphonique.

D'autres airs sont chantés a cappella offrant de jolies assonances, comme ''Perdre le sens devant vous''. Dans ''La béle gloire, le bèl honeur doner, Doner la mort à qui a doné le cœur !'', la saveur du poème tient à ce refrain chanté d'abord à 4 puis à 6 voix. On trouve encore un troisième type de pièces où les voix inférieures sont réduites à un instrument, comme il en est de l'air de cour, alors que toutes les voix sont réservées au refrain. Ainsi de l'air gracieux ''Brunelette, joliette'', à 3 & 5 voix, et de ''Francine, Rôzine'' où se succèdent en huit sections chant (soprano), rechant (ensemble des voix), chant (ténor), rechant, chant (soprano), rechant, chant (ténor) et rechant. Pour ''Ces amoureux n'ont que douleur et tourment'', le schéma est tout aussi complexe entre chant et ''rechant et reprise''. Le programme comprend aussi deux morceaux purement instrumentaux dont la Première fantaisie à 4, qui n'appartient pas au recueil Le Printemps : très développé, le morceau est joué ici avec un effectif instrumental varié, au clavecin solo ou à deux ou trois voix, alors enrichi de luth et de harpe, pour un savant dialogue.

L'Ensemble Gilles Binchois illumine ces pièces de ses sept voix : deux sopranos, Lisa Magrini, Anne-Marie Lablaude, alto, Dina König, basse, Cyril Costanzo, et deux ténors, Vincent Lièvre-Picard et Dominique Vellard qui dirige aussi le tout. On admire la douceur des timbres, la pureté de l'émission, la beauté des lignes, l'élégance et le naturel du geste, qui rendent justice à la souplesse de la prosodie. Le jeu de répons et de dialogues entre les divers effectifs vocaux ne laisse pas d'enchanter. Les trois instrumentistes sont tout aussi magistraux : Catalina Vicens, spinet (clavecin), Claire Piganiol (harpe) et Julian Behr (luth).

L'enregistrement, à l'église Sainte-Colombe de Hattstatt, est d'un parfait naturel quand au placement des voix, dans une acoustique agréable non résonnante. Ce qui met en valeur l'infinie plasticité de la polyphonie vocale et instrumentale.

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Texte de Jean-Pierre Robert 

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