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  • Jean-Pierre Robert
  • Musique

CD : Les ''Parisiennes'' de Haydn par l'Orchestre de Chambre de Paris

Haydn orchestre de chambre de Paris

  • Joseph Haydn : intégrale des symphonies dites ''parisiennes'', Nos 82 ''L'Ours'', 83, ''La Poule'', 84 , ''In Nomine Domini'', 85, ''La Reine'', 86 & 87
  • Orchestre de Chambre de Paris, dir : Douglas Boyd
  • 2 CDs NoMadMusic : NMM078 (Distribution : PIAS)
  • Durée des CDs : 69 min 15 s + 66 min 18 s
  • Note technique : etoile bleueetoile bleueetoile bleueetoile bleueetoile bleue (5/5)

Les six symphonies que Joseph Haydn a composées à Paris en 1785 & 1786 l'ont été sur une commande française pour l'Orchestre du Concert de la Loge Olympique. Plusieurs manuscrits en sont conservés à la BNF. Cette nouvelle intégrale due à l'Orchestre de Chambre de Paris dirigé par Douglas Boyd est d'une remarquable probité musicale, qui la place en bonne position face aux versions de référence de Dorati ou d'Harnoncourt.

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Même si bien occupé par ses fonctions de Maître de chapelle à la cour d'Esterházy, Joseph Haydn n'était pas lié par ce qu'on appelle aujourd’hui une clause d'exclusivité. Plusieurs de ses voyages à travers l'Europe lui ont permis d'honorer des commandes de mécènes. Comme celle, en France, du comte d'Ogny, au demeurant violoncelliste amateur. Surtout que l'orchestre qui devait créer les six futures symphonies passait pour un des meilleurs du moment. Plusieurs de celles-ci seront vite pourvues d'un surnom, témoin de leur vif succès auprès des spécialistes mais aussi du public. Au nombre duquel la reine Marie-Antoinette. D'où l’appellation de ''La Reine'' donnée derechef à l'opus 85. Ces musiques figurent en bonne place parmi les 104 de son auteur, rivalisant avec le set des douze dernières dites ''londoniennes''. Le regain actuel d'intérêt pour le corpus symphonique de Papa Haydn n'est pas pour démentir cette popularité. Les ''Parisiennes'' sont en effet d'une immédiate séduction car elles content chacune une histoire et comme toujours chez le compositeur, déploient allant, esprit, effets de surprise et un charme qui ne faiblit jamais.

Pour ne relever que quelques traits caractéristiques, et s'en tenir à l'ordre adopté par Douglas Boyd, qui ne recoupe pas la stricte chronologie de composition non plus que la simple numérotation, on remarque dans la Symphonie N°83, ''La poule'', en sol mineur (1785) un premier Allegro spiritoso à 4/4 dont se détache le fameux caquetage du volatile aux violons I et au hautbois solo, et un Andante à la mélodie souple contrastant l'intensité, en particulier dans des traits des cordes énonçant la même note pendant plusieurs mesures, de plus en plus piano. La Symphonie N°86 en ré majeur (1786), la plus développée des six, se distingue par son premier mouvement qui voit un Adagio d'une réelle puissance par son martèlement fortissimo être suivi d'un Allegro spiritoso nanti d'un long développement bien senti. Le Capriccio Largo s'écoule telle une improvisation « dans la descendance des fantaisies de CPE Bach », selon Marc Vignal (in ''Joseph Haydn'' / Fayard) qui signale aussi des « audaces harmoniques et modulantes extrêmes ». Le Finale Allegro retrouve le martèlement du début et est empli de joie de vivre.

De la Symphonie N°87 en la majeur, on remarque l'originalité du Vivace initial qui s'élance forte avec vigueur et progresse dans un luxe de nuances dynamiques. L'Adagio à caractère hymnique fait la part belle aux bois, flûte et hautbois, qui se voient offrir de brèves cadences et même un échange à deux à la coda. L'ancien hautboïste du Chamber Orchestra of Europe qu'est Douglas Boyd le pare d'une réelle distinction. On admire à la Symphonie N°84 en mi bémol (1786), au premier mouvement, un Largo ample débouchant sur un Allegro monothématique diversement travaillé de par la clarté de l'instrumentation, puis un Andante à variations dont la 3ème offre une étonnante cadence des vents sur un discret accompagnement des cordes. Le Menuet Allegretto est d'allure rustique de Ländler très articulé.

D Boyd et OCP
Douglas Boyd et l'OCP ©DR

La Symphonie N°85 ''La reine'' en si bémol majeur est une « synthèse magistrale d'élégance et de vigueur, de savant et de populaire » (ibid.). Elle s'ouvre par un mouvement lui-même divisé en Adagio et Vivace, schéma typique chez Haydn. Le ressort dramatique est dans le contraste des diverses phrases et leur reprise dans une tonalité différente. La ''Romance'' Allegretto s'inspire d'une chanson française et offre 4 variations dont la 3ème avec flûte solo. Le Menuet Allegretto rappelle un menuet de cour, galant mais sans complaisance même dans les traits enlevés des cordes. Le trio tranche par son côté plus rustique. Le Presto final est là encore un savant mélange de raffinement et de ton populaire. La Symphonie N°82, dite ''L'ours'', en ut majeur, de 1786, offre un ton martial avec cor et roulement de timbales. Comme au puissant Vivace assai et sa succession d'accords d'intensité décroissante jusqu'au pianissimo. Les bois jouent une partie importante et la progression du discours révèle d'étonnantes transitions. À noter aussi un Allegretto avec variations alternées, plein de charme. Et un finale Vivace d'une scansion originale, qui est sans doute à l'origine du surnom donné à l’œuvre.

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La présente interprétation est enthousiasmante. Elle fait usage d'un large nuancier dynamique pour éviter ce que Douglas Boyd décrit comme le risque de grisaille auquel conduirait la simple opposition entre forte et dolce. La grande différentiation de l'intensité, telle est une des clés de la réussite de l'exécution de ces œuvres, comme de tout le corpus symphonique de Josef Haydn. La pulsation est énergique mais souple à la fois. Les choix de tempos judicieux, où respirent la joie de vivre, l'esprit dans les mouvements rapides, la souplesse dans les passages lents. Ce qui rejoint la justesse des accents sans qu'il y ait manière à s'appesantir, encore moins à laisser entrevoir quelque lourdeur, même dans les Ländler, là où l'esprit prime sur le tempo. Le chic de l'exécution emporte le tout, que procure le jeu immaculé et engagé des musiciens de l'Orchestre de Chambre de Paris : finesse des cordes, violons I & II étant répartis de part et d'autre, caractère gracile des bois. Voilà des interprétations où tout semble couler de source, sans pour autant verser dans des recherches excessives historiquement informées. Et un bel album souvenir du magistral travail réalisé par Douglas Boyd durant son mandat à la tête de l'orchestre.

Les enregistrements, à la Philharmonie de Paris en 2018 et 2020, offrent une image large sur les cordes qui occupent tout le spectre, bois et percussions, placés au centre, étant bien intégrés à l'ensemble, sans éloignement excessif. Le tout dans une ambiance d'une immédiateté certaine. En un mot, le naturel d'une exécution de concert.
Texte de Jean-Pierre Robert 

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Orchestre de Chambre de Paris, Haydn, Douglas Boyd

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