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  • Jean-Pierre Robert
  • Musique

CD : le quintette pour piano d'Olivier Greif

Olivier Greif A tale of the world

  • Olivier Greif : Quintette A Tale of the World pour piano, deux violons, alto et violoncelle, op.307
  • Quintette Syntonia
  • 1 CD CIAR Classics : CC002 (Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.)
  • Durée du CD : 48 min 25 s
  • Note technique : etoile verteetoile verteetoile verteetoile verteetoile verte (5/5) 

Ce disque est l'occasion de se pencher sur l'univers créateur singulier du compositeur Olivier Greif prématurément disparu en 2000. Le Quintette pour piano et cordes qui voit ici son premier enregistrement, offre cette particularité de mêler texte et musique, non pas à titre de référence sous-jacente ainsi que le pratique Jacques Lenot par exemple, mais comme éléments de langage à part entière. Son titre ''A Tale of the World'' montre combien le musicien souhaite voir grand. Ses interprètes du Quintette Syntonia s'investissent à fond dans ce qui est une quête aussi musicale que spirituelle.

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Olivier Greif (1950-2000) laisse un corpus substantiel dans lequel le domaine de la musique de chambre tient une place importante. Auteur de trois quatuors à cordes et d'un trio avec piano, il écrit son Quintette pour piano et cordes sur une commande du festival finlandais de Kuhmo. Achevée en 1994, l’œuvre ne sera créée que deux ans plus tard. Elle figure au nombre de ses dernières compositions. Se référant à son titre, Thibault Noally, second violon de Syntonia, parle d' ''Une Œuvre-Monde''. Elle puise en effet ses racines tant aux philosophies orientales prisées par le musicien, qu'à la littérature européenne. Par ses vastes dimensions, elle se place dans le droit fil des œuvres-sommes qu'a connu le XXème siècle français ou allemand. On pense à Proust ou à Hölderlin. La profonde originalité de la composition est la présence de textes déclamés par les musiciens eux-mêmes en superposition à la musique. Au point que pour Greif il s'agit d'une œuvre qui est « autant roman que quintette ».

Elle est constituée de cinq mouvements enchaînés dont trois portent une indication d'ordre littéraire : ''De profundis'' pour le premier, ''Le Cercle des mondes'' pour le second, et dans le cas du dernier, ''En Soph'' (près de Dieu en hébreu). Greif indique que le nombre de 5 est essentiel dans la composition musicale par l'omniprésence de l'intervalle de quinte, et « au niveau du compte des temps ou des mesures ou à celui de la répétition de certaines formules musicales particulières ». Pour ce qui est des textes « se chevauchant » au sein du quintette, ils sont en allemand, français (emprunté à ''A la recherche du temps perdu''), italien, sanskrit ou anglais (un chant d'origine bourguignonne du XVème siècle). Le chant anglais parcourt d'ailleurs l’œuvre « tel un fil rouge et revenant à intervalles réguliers ». Les diseurs de ces textes en sont les musiciens eux-mêmes, soit en solo, soit à plusieurs, qui procèdent en parlant, chantant ou psalmodiant parfois jusqu'au simple murmure. Le résultat est un effet de collage singulier qui n'a rien à voir avec le modèle de l'accompagnement voix-musique. Un traitement tout à fait spécifique, mû par une volonté d'unification des diverses formes de langages en un tout. Comme Gustav Mahler l'avait en son temps envisagé pour sa musique qui devait « tout embrasser » afin de « bâtir un monde », ainsi que le rapporte Brigitte François-Sappey. En un mot, non pas hétérogénéité mais unité au sens de fusion.

Il faut se laisser porter par cet alliage singulier musique-texte et vite dépasser l'effet de surprise. Car l'architecture extrêmement pensée conçue par Olivier Greif offre des combinaisons intéressantes, toujours renouvelées. Ainsi des violons I & II et de l'alto sur le texte de Proust dans le deuxième mouvement, auquel succède un passage de piano seul, puis un solo de violoncelle ou encore un ostinato de l'ensemble des 5 voix. Ou tel motif au piano revenant en boucle au 3ème mouvement qui voit une animation soudaine s'inférer de l'échange entre piano et cordes, en fait opposition de deux blocs plus que réel dialogue. Le texte en sanskrit murmuré par l'ensemble des musiciens au mouvement 4 est interrompu par un passage médian en anglais. Le dernier aboutit à une sorte de décantation du langage dans le registre pianissimo, qui voit « une progression vers la lumière ».

C'est peu dire que l'exécution d'une telle pièce relève du challenge pour ses interprètes. Noally relate que ce « chemin » fut « certainement la plus belle et la plus marquante des aventures ». Chacun des musiciens, Stéphanie Moraly, Thibault Noally (violons), Hélène Desaint (alto), Patrick Langot (violoncelle) et Romain David (piano), livrent une performance proprement non pareille à la fois instrumentale et vocale. Ils sont magnifiquement saisis dans une acoustique intimiste et propice à l'éclosion des trésors cachés de cette œuvre.

Texte de Jean-Pierre Robert  

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