Skip to main content
PUBLICITÉ
  • Jean-Pierre Robert
  • Musique

CD : La Hofkapelle de Dresde, orchestre européen

Per LOrchestra Di Dresda

Cet album est le premier volume d'une série destinée à mettre sous les feux du projecteur la fameuse Hofkapelle de Dresde qui, durant la première moitié du XVIIIème siècle, passait pour un des orchestres les plus réputés d'Europe. Au point que la plupart des compositeurs de l'époque ont écrit pour lui. En guise d'ouverture à un parcours qui promet d'être riche de découvertes, Alexis Kossenko et son orchestre Les Ambassadeurs proposent des œuvres essentiellement de musiciens tchèques.

LA SUITE APRÈS LA PUB

C'est à Vivaldi que l'on doit un ''Concerto con molti stromenti'' (RV 577) dédié à cette formation : ''Per l'orchestra di Dresda'', porte-t-il en titre. La Hofkapelle devait connaître, sous l'impulsion des Princes Électeurs de Saxe, une incroyable activité entre 1709 et 1760. À l'origine, formée sur le modèle des orchestres français, elle succombera vite aux sirènes italiennes. Mais tout ce que le monde de l'art comptait de musiciens en vogue composèrent pour Dresde : de Lully à Campra, de Zelenka à Pisendel, de Tartini à Corelli et bien sûr Vivaldi, mais aussi Haendel, Hasse ou Telemann. Tous émerveillés par la pratique de ses formidables instrumentistes, sous la houlette de leur prestigieux Kapellmeister, Pisendel, puis Heinichen, Lotti et Hasse. Et portés aussi par l'évolution notable de la facture instrumentale à cette époque bénie.

Le présent programme fait entendre d'abord des pièces de Johann David Heinichen (1683-1729), compositeur ''redécouvert'' il y a quelques 25 ans par le label DG publiant une sélection de ses concertos. D'abord, l'Ouverture de Diana sull'Elba, musique lumineuse, rehaussée de trois cors solistes. Puis des extraits de deux de ses messes, dont un noble ''Crucifixus'' en forme de berceuse crépusculaire et un Concertino alliant flûtes à bec et traversières, un exemple d'insertion d'un morceau instrumental dans le cours de la liturgie (Missa no.9). Quant au Concerto en Ré majeur, sur le modèle du concerto grosso, ses trois mouvements rapides montrent une écriture savante faisant la part belle à plusieurs solistes comme le corno da caccia, trois flûtes ou un violon, destinée aux fameux instrumentistes que comptait alors la Hofkapelle de Dresde. Elle est en effet très inventive. Ainsi du curieux Un poco allegro médian, la flûte dialoguant avec trois hautbois, comme l'accompagnant en trottinant, le tout ponctué de pizzicatos de cordes. Le preste finale affiche des fanfares de cor de chasse pétaradant au lointain.

Jan Dismas Zelenka (1679-1745), violoniste de Bohème et personnage excentrique, privilégie une écriture dense, parfois violente, comme dans l'Ouverture de son oratorio I penitenti al sepolchro del redentore, d'une grande tension, notamment l'heure d'une complexe triple fugue dont la longueur semble avoir pour dessein de faire ressentir à l'auditeur la douleur des souffrances du Christ. Le Kyrie eleison de de sa Missa dei filii mêle contemplation et violence dans le chant, tandis que l'orchestre répond par des cris de douleurs. Johann Georg Pisendel (1687-1755) est représenté par sa Sonate pour orchestre en Do Mineur, d'une étonnante brièveté en ses deux mouvements, libérant « une puissance sévère, une intensité brûlante », selon le chef. Dans une tonalité sombre et un tempo solennel (Largo), puis une fugue haletante (Allegro). L'Ouverture pour deux orchestres de Johann Friedrich Fasch (1688-1758) est une pièce extravagante, appartenant au genre des musiques dites à plusieurs chœurs, dans le modèle de Gabrieli. Son orchestration rutilante aligne pas moins de six hautbois et quatre bassons, utilisés dans des tempos plus qu'énergiques, opposant bois et ripieno des cordes.

De Telemann est donné son Concerto pour violon en Ré majeur, qui avait été remanié par Pisendel pour être joué par l'Orchestre de Dresde, remplaçant sans vergogne la trompette par le cor. La pièce se distingue par son Adagio doté d'une partie de violon intense. Voilà un exemple de révision par un interprète pour son propre compte, et ce faisant s'appropriant une œuvre. Enfin Johann Joachim Quantz (1697-1773), flûtiste renommé, pédagogue, fut un prolixe compositeur, en particulier pour son royal protecteur Frédéric II de Prusse. Il reste « un acteur important de la vie musicale dresdoise », remarque Kossenko. Son Concerto pour deux fûtes en Sol mineur est écrit pour un orchestre de composition généreuse, gratifié de tutti vigoureux, comme au Presto final énergique avec de belles roulades des deux flûtes solistes. L'Amoroso médian con sordini (avec la sourdine), dans un tempo andante, voit les deux solistes échanger avec délicatesse.

Alexis Kossenko insiste sur le choix d'un orchestre à l'effectif fourni, comme celui destiné à jouer à l'église plutôt qu'au concert. Son propre orchestre Les Ambassadeurs – La Grande Écurie y pourvoit avec brio et ses solistes dispensent des sonorités particulièrement séduisantes, alliant patine et brio dans le jeu. Les contributions chantées sont de pareille qualité. La production a opté pour une prise de son, à l'Abbaye de Royaumont, privilégiant une acoustique très ouverte, quelque peu réverbérée, et favorisant une image sonore très large avec effets d'écho sur les vents, les bois singulièrement. Si l'écoute n'est pas toujours des plus confortables, les solistes sont heureusement saisis dans une satisfaisante proximité.

LA SUITE APRÈS LA PUB

Texte de Jean-Pierre Robert  

Plus d’infos

  • ''Per l'orchestra di Dresda'' Vol. 1 Ouverture
  • Johann David Heinichen : Sonata Diana sull'Erba. Missa N°12 (extraits). Missa N°9 (extraits). Concerto en Ré majeur
  • Jan Dismas Zelenka : Il serpente di bronzo. Missa dei Filii (extraits)
  • Georg Philipp Telemann : Concerto pour violon en Ré majeur
  • Johann Joachim Quantz : Concerto pour deux flûtes en Sol mineur
  • Johann Georg Pisendel : Sonate pour orchestre en Do mineur
  • Johann Friedrich Fasch : Ouverture pour deux orchestres
  • Stephan MacLeod (basse), Coline Dutilleul (soprano)
  • Les Ambassadeurs - La Grande Écurie, flûte & dir. Alexis Kossenko
  • 1 CD Aparté : AP 258 (Distribution : [Integral])
  • Durée du CD : 82 min
  • Note technique : etoile orangeetoile orangeetoile orangeetoile orangeetoile grise (4/5)

CD disponible sur Amazon



Autres articles sur ON-mag ou le Web pouvant vous intéresser


Alexis Kossenko, Georg Philipp Telemann, Les Ambassadeurs, La Grande Ecurie, Johann David Heinichen, Jan Dismas Zelenka, Johann Joachim Quantz, Johann Georg Pisendel, Johann Friedrich Fasch, Stephan MacLeod, Coline Dutilleul

PUBLICITÉ