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  • Jean-Pierre Robert
  • Musique

CD : Mariam Batsashvili joue les Maîtres du piano romantique

Mariam Batsashvili

Cet album regroupe des paraphrases de Liszt et des transcriptions d'autres compositeurs d’œuvres du répertoire romantique. Les pièces maîtresses en sont la Valse du Faust de Gounod écrite par Liszt, et le Grand Caprice sur des motifs de La Somnambule de Bellini conçu par Sigismond Thalberg, sans doute jouées lors du mémorable duel pianistique les ayant opposés dans un salon parisien en 1837. De Liszt, Mariam Batsashvili remarque qu'il « s'est attaché à évoquer sans exagération les sentiments des univers dramatiques et poétiques de l’œuvre originale ». Un parcours musico-littéraire que la pianiste géorgienne joue avec talent et relate dans l'entretien figurant dans la plaquette du disque.

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Franz Liszt s'est fait une spécialité des transcriptions, ses fameuses paraphrases. Mariam Batsashvili en propose quelques-unes. Ainsi de ''La mort d'Isolde'' de Wagner. Où, selon elle, « Liszt a capturé ce qui chez Wagner me semble être l'énergie de tout l'univers ». Elle relève aussi que le transcripteur a légèrement modifié le texte musical « mettant parfois en avant les parties orchestrales et submergeant même la ligne vocale d'Isolde, surtout à la fin ». On le ressent dans les accords grondants du piano lors du grand climax du morceau. Les deux paraphrases de Lieder de Schubert montrent une autre facette du mode de transcription chez Liszt. Dans ''Ständchen'', il recherche la vocalité dans ce qui prend la forme d'une sérénade, à travers des textures différentiées, et « ne romantise pas ». ''Aufenthalt'', dans une allure de marche, évoque en réalité le chant intérieur d'un homme qui aspire au repos pour apaiser ses tourments. De fait, on ressent le chant dans la manière dont la pianiste joue ces deux pièces. Liszt a aussi transcrit ses propres œuvres, comme il en est de Die Lorelei.

Vient La Valse de l'opéra Faust (de Gounod). Elle reprend, durant la scène de la kermesse, l'épisode de la première rencontre entre Faust et Marguerite. C'est d'abord l'éblouissement de la fête, puis la pièce prend un ton méditatif lors de l'évocation de la rencontre, où l'on entend presque les paroles des deux amants. Intervient alors une transition imaginée d'un monde de fébrilité, traduit dans l'extrême aigu du piano. C'est enfin le retour de la valse première, mais celant cette fois quelque chose de malsain et de macabre dans la profusion des glissandos. « Ce n'est pas une bonne valse, c'est une valse où l'on perd la raison » jusqu'à « une extase déréglée », remarque la pianiste.

Mariam Batsashvili met en regard une autre transcription d'un morceau opératique, due cette fois à Sigismond Thalberg (1812-1871) : le Grand Caprice sur les motifs de La sonnanbula de V. Bellini, op.46. Elle se plaît à comparer à cette occasion le style des deux musiciens, rivalisant d'audace, là où Thalberg « produisit un effet énorme », à propos du fameux ''duel'' de 1837. Pourtant tout ici n'est pas que virtuosité transcendante, mais aussi tendresse, qui appert de la très lyrique musique de Bellini, nuancée de traits de couleurs dans l'accompagnement logé dans l'aigu du clavier, alors que la mélodie est restituée avec une réelle poésie. Le spectre pianistique large ne doit pas cacher le vrai de l'original, même dans les passages d'une redoutable technicité, telle la fin du morceau. La transcription par Richard Strauss de la Valse en sol bémol de Schubert est beaucoup plus sage. Celle de Prélude, Fugue et Variation op.18 de Franck, due à Harold Bauer, reste fidèle à l'original pour orgue. Elle donne l'illusion d'entendre le son de cet instrument par le truchement du jeu sur les couleurs et les textures.

La pianiste géorgienne ajoute deux valses, la Valse N°5 op.42 de Chopin, légère dans son débit rapide, et la Valse de bravoure de Liszt, qui placée après la paraphrase de la Valse de l'opéra Faust, complète le panel virtuose, mais qu'elle conçoit raisonnée. Encore un bon exemple de l'art de cette jeune artiste (*1973) quant à la sensibilité de l'approche, à la souveraine maîtrise des extrêmes de difficulté, voire à une dose d'humour distillé çà et là.

L'enregistrement à la Siemens-Villa de Berlin dispense une image proche et d'un beau relief, et une excellente définition de l’instrument.

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Texte de Jean-Pierre Robert 

Plus d’infos

  • ''Romantic Piano Masters''
  • Transcriptions par Liszt d'œuvres de Wagner (Isoldens Liebestod), Gounod (Valse de l'opéra Faust), Schubert (Lieder ''Ständchen'', D 957/4 & ''Aufenthalt'', D 957/5)
  • Par Sigismond Thalberg (Grand Caprice sur des motifs de La sonnambula de V. Bellini, op.46)
  • Par Harold Bauer (Prélude, Fugue et Variation op.18 de Franck)
  • Par Richard Strauss (Valse en Sol bémol de Schubert)
  • Chopin : Valse N°5 en La bémol op.42/5
  • Franz Liszt : Valse de bravoure
  • Mariam Batsashvili, piano
  • 1 CD Warner Classics : 190296290619 (Distribution : Warner Classics)
  • Durée du CD : 69 min 53 s
  • Note technique : etoile orangeetoile orangeetoile orangeetoile orangeetoile orange (5/5) 

CD disponible sur Amazon 



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Schubert, Chopin, Wagner, César Franck , Charles Gounod, Vincenzo Bellini , Mariam Batsashvili

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