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  • Jean-Pierre Robert
  • Musique

CD : Alexander Paley joue les Préludes op.32 de Rachmaninov

Rachmaninov Alexander Paley

Alexander Paley poursuit avec ce volume 2 l'exploration de l’œuvre pour piano solo de Rachmaninov. Les Préludes de l'opus 32 en forment l'essentiel. Ce deuxième cahier bénéficie des mêmes caractéristiques interprétatives que le premier : une vision de virtuosité asservie à la veine mélodique et à la profondeur du geste.

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Comme les dix Préludes de l'op.23 (1903), les Préludes op.32 sont un concentré de Russie, ses paysages, les états d'âme de tout un peuple, et ce au-delà du pittoresque : des visions presque idéalisées à travers la palette sonore de Rachmaninov. Par rapport aux précédents, se produit une décantation du style du compositeur vers une plus grande intériorité, sans renier la composante de virtuosité, souvent vertigineuse, associée à son écriture. Ils sont sans doute moins ostentatoires et recèlent beaucoup de contrastes. Évoquant souvent une atmosphère de légende. Alternent morceaux vifs et plus calmes. Au titre des premiers, le Prélude N°1, Allegro vivace, entame la série par des accords fff assénés en feu d'artifice, taquinant la dissonance. Ou l'éclat du N°3, qui pourrait faire penser à l'atmosphère du Mardi gras de Petrouchka. Le N°6, Allegro appassionato, page emplie de frénésie traversée de visions angoissées et chaotiques de ses grands accords dans le grave. Le N°8, Vivo, très concis, offre un exemple du genre de ''danse-toccata'', familier à Rachmaninov ou la vélocité d'une sorte de perpetuum mobile, soulignée par des accents endiablés, comme on en trouve dans les finales des concertos de piano. Ailleurs, on rencontre l'audace des enchaînements de thèmes (N°2), ou une manière qui pourrait rappeler une romance de Schumann (N°7) dans un dialogue figuré entre deux voix, jusqu'à une fin ppp. Ou encore la polyphonie savante et les étonnants alliages de registres au N°9. 

Les préludes sur le versant lent ne sont pas moins intéressants. Ainsi du N°5, Moderato, tout de pureté et de fraîcheur dans sa mélodie sobre, presque candide à la main droite sur un accompagnement d'arpèges en ostinato à la gauche. On l'a comparé à un paysage de steppe russe au clair matin. Le N°10 déploie une mélopée lancinante empreinte de nostalgie, si chère à Rachmaninov, qui s'élève progressivement pour retomber dans une profonde mélancolie planante, alors qu'au médian surgissent des poussées d'accords en déploration poignante. Le caractère de légende est évident au N°11 dans une douce narration, comme pour le suivant, N°12, bien chantant. On a vu dans ce dernier un morceau « plein de triste réflexion, de sonorité modulée... un appel de cloches dans les lointains de la Russie embrumée en automne » (Nikolaï Bajanov). Au Prélude N°4, le plus développé de la série, c'est un ton de légende héroïque dans ses péripéties truffées de modes pianistiques variés, souvent novateurs. Le dernier, N°13, dégage un souffle lyrique de son harmonie chatoyante, qui résume le sens de ce deuxième cahier des Préludes. On y trouve virtuosité échevelée, différentiation des registres et même une cadence au milieu, enfin péroraison grandiose dans une formidable explosion d'accords majestueux, là encore en sonnerie de cloches.

L'album est complété par deux Études-Tableaux de l'op.33, dans leur version originale, abandonnée ensuite par Rachmaninov. Après une introduction sombre et saccadée, la pièce N°3 mène à une plage extatique dans un doux balancement et un ton postromantique. La N°4 se signale par son rythme obsessionnel. Fantaisie et humour côtoient le mode carillonnant, cher à l'auteur. Sa modernité aussi ne laisse pas d'étonner.

Alexander Paley épouse toutes les facettes du langage mélodique inventif, de l'univers harmonique imaginatif que distille Rachmaninov aussi bien dans ses Préludes que dans les Études-Tableaux. Sans parler de l'originalité en termes de technique pianistique. Il excelle à en saisir les contrastes et la profusion de couleurs. Ce que met en exergue une prise de son captant l'instrument très proche, non sans quelque dureté lorsque domine le registre forte.

Texte de Jean-Pierre Robert  

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Plus d’infos

  • Serge Rachmaninov : Préludes op.32. Deux Études-Tableaux op.33 (version originale)
  • Alexander Paley, piano 
  • 1 CD la Música : LMU 027 (Distribution : [Integral])
  • Durée du CD : 63 min 58 s
  • Note technique : etoile rougeetoile rougeetoile rougeetoile rougeetoile grise (4/5)

CD disponible sur Amazon



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