CD : le Quatuor Psophos joue les Quatuors op.54 de Joseph Haydn
Le Quatuor Psophos, fondé en 1997 au Conservatoire de Lyon et qui a bénéficié des conseils des Ysaÿe, Berg, LaSalle et Hagen, se veut éclectique dans ses choix artistiques, notamment au disque, de Ravel à Bacri, de Dutilleux au jazz. Ils abordent cette fois le classicisme avec les trois quatuors de l'opus 54 de Josef Haydn. Des œuvres foisonnantes d'inspiration, auxquelles ils apportent spontanéité et technique immaculée.
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Composés en 1788, les trois Quatuors op.54 appartiennent à la période de maturité de Haydn. Associés à ceux de l'op.55 et de l'op.64, ils ont été publiés par l'entremise d'un certain Johann Tost, violon de l'orchestre du Prince Esterhazy, personnalité un peu trouble, car fondateur d'une entreprise clandestine de copies de manuscrits, de ceux de Haydn en particulier. Ils sont présentés ici dans l'ordre de leur publication. Le Quatuor op.54 N°2, Hob. III:57 est une œuvre étrange en tous points. De par son écriture, comme il en va du Vivace liminaire, où le thème lancé vivement est bâti sur deux fois six mesures entrecoupées d'un silence. Le violon I se voit ensuite conférer un rôle essentiel. Par ses inspirations aussi. Ainsi, à l'Adagio, constitué d'une mélodie toute de désolation, dont émerge le violon I soutenu par les trois autres instruments. Non sans quelques dissonances dans ce qui semble ressortir à une imitation de style tzigane. Le Menuetto, enchaîné, possède une tournure dansante et le trio revient sur le ton douloureux de l'Adagio. Le finale débute par un Adagio soutenant une cantilène expressive du violon I et du cello. Que suit un Presto sur un refrain. Un de ces effets de surprise qu'affectionne Haydn. Retour au tempo lent pour la fin de cette pièce hors normes.
Le Quatuor op.54 N°1 Hob. III:58 s'ouvre par un Allegro con brio énergique et d'une belle faconde à partir du Ier thème exposé par le violon I. Se succèdent des épisodes lyriques et des passages lapidaires au développement et à la coda. L'Allegretto avenant conduit le violon I dans des contrées suraiguës. Le mouvement utilise largement les répétitions et propose des modulations inattendues. Au Menuetto, les choses reviennent à un mode plus terre à terre, toujours menées par le premier violon, et le trio voit un dialogue à trois de ton populaire, sans le violon I. Le finale Presto est éblouissant dans le travail instrumental. Le discours connaît des points d'arrêt avant qu'il reparte de plus belle, non sans une pointe d'humour. Le Quatuor op.54 N°3 Hob III:59 voit l'art de la conversation en musique à son apogée. Comme à l'Allegro, par le dialogue entre le violon I et l'alto, puis entre le violon II et l'alto. Des interruptions et des accélérations nourrissent une savante dramaturgie. L'Adagio cantabile, très orné et légèrement saccadé, est un instant de pur plaisir. Le discours s'anime par de brillantes volutes du violon I. Les reprises ne font, comme chez Mozart, que renforcer la qualité de l'inspiration. Un Menuetto enjoué, avec son trio débutant à l'unisson des quatre protagonistes, mène au finale Presto qui retrouve la manière aimable du début de l'œuvre, dans un allant peu résistible.
Dans des exécutions différentes de celles dites historiquement informées, comme il en fut du Quatuor Mosaïques, les Psophos se distinguent par des couleurs instrumentales claires et ciselées, dont le violon I de Mathilde Borsarello Herrmann. Comme par un sûr doigté quant au choix des accents et des tempos. On admire l'intensité de l'approche qui sait ne pas abandonner la légèreté du geste non plus que l'humour. Ils sont captés, à la Cité de la Musique et de la Danse de Soissons, dans une ambiance aérée avec une excellente définition spatiale des quatre voix.
Texte de Jean-Pierre Robert
Plus d’infos
- Joseph Haydn : Quatuors op.54, N°1 Hob. III:58 , N°2 Hob. III:57, N°3, Hob. III:59
- Quatuor Psophos
- 1 CD EnPhases : ENP 0089 (Distribution : Outhere Music)
- Durée du CD : 58 min 27 s
- Note technique :
(5/5)
CD disponible sur Amazon
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