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  • Jean-Pierre Robert
  • Musique

CD : l'oratorio de Haendel Solomon magnifié par Leonardo García Alarcón

Solomon Handel

Peu donné en concert et enregistré, l'oratorio Solomon compte pourtant parmi les plus belles inspirations de Haendel, eu égard à ses somptueux chœurs en particulier. Leonardo García Alarcón en livre une version complète qui bénéficiant de l'adrénaline du concert, réunit tous les atouts de la réussite.

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Après une trilogie d'oratorios de facture guerrière, Judas Maccabée, Joshua et Alexander Balus, Haendel se tourne vers un sujet plus serein, de nature biblique. Que lui offre le personnage consensuel du Roi Salomon. Peu appréciée à sa création à Londres en 1749, seulement reprise en 1759, moyennant coupures, l’œuvre sombrera dans un doux sommeil. Jusqu'à sa redécouverte dans les années 1950 par le chef Sir Thomas Beecham. Il faut dire qu'elle traite de trois épisodes distincts, sans lien apparent outre le fait qu'ils mettent en scène également le roi d’Israël : l'édification du Temple de Jérusalem, le Jugement de Salomon départageant deux prostituées revendiquant le même enfant, enfin la rencontre avec la Reine de Saba. Autant dire une trame assez mince dont on ne connaît au demeurant pas l'auteur, en rien héroïque comme bien d'autres oratorios du Saxon. À y regarder de près, il existe pourtant un élément unificateur : la glorification de la droiture de Salomon, et à travers lui, celle du monarque régnant alors à la cour de Londres, George II. On trouve même un effet de symétrie entre les deux parties extrêmes. Car outre la louange de la puissance et de la sagesse de Salomon, y est interrogée la sagacité de ses rapports avec les femmes, sa propre épouse puis la reine de Saba, aux Ier et IIIème actes, qui comptent l'un et l'autre un duo à connotation amoureuse. L'autre particularité est l'importance du chœur qui tout au long du déroulement de ces péripéties, occupe une place centrale, à la fois acteur et commentateur de l'action. Il en émane une vraie théâtralité, depuis son intervention liminaire jusqu'à la conclusion, toujours louangeuse tour à tour de Salomon et de Jehovah. Il est enfin une caractéristique essentielle : l'évocation omniprésente de la nature dans des représentations musicales aussi raffinées que poétiques, telles des peintures de paysages.

Aussi la musique se meut-elle le plus souvent sur le versant serein, d'une écriture raffinée pour les cordes et les quelques solos accompagnant les arias, de violon ou de hautbois. Sans pour autant renier la pompe fastueuse qu'autorisent cuivres et timbales, singulièrement dans la troisième partie, là où Salomon fait assaut de magnificence quant au divertissement musical qu'il offre à son hôte royale. Les arias sont riches, sur le mode da capo, mais peu développées, comparées à d'autres oratorios ou opéras de Haendel. Comme déjà remarqué dans son interprétation de l'oratorio Samson, Leonardo García Alarcón, très impliqué, est le premier artisan de la réussite. Sa direction, soucieuse de l'équilibre des masses sonores, les nuance à l'extrême avec un soin particulier quant à l'expressivité de l'accompagnement des arias comme à la richesse de l'instrumentation dont il émane un parfum italianisant. Son Millenium Orchestra répond avec la plus extrême flexibilité et pare ces pages de couleurs mordorées. Le Chœur de chambre de Namur, saisi dans ses murs, apporte lui aussi une contribution essentielle par un chant d'une rare ductilité, en particulier chez les sopranos. 

La distribution est un sans-faute. Le jeune contre-ténor Christopher Lowrey prête sa voix claire et bien sonnante à un rôle-titre très sollicité, notamment dans les arias sur le versant rapide et richement ornementées, comme ''Haste to the cedar grove''/Hâtes-toi, cours au bois de cèdre, à l'acte I/2 ou ''How green our fertile pastures look''/ Comme nos fertiles pâturages paraissent verts, mais aussi quant à l'intensité conférée aux morceaux poétiques (''When the sun o'er yonder hills''/ Quand, de ces collines là-bas, le soleil, acte II/1). Matthew Newlin, déjà remarqué dans le rôle-titre de Samson, offre au rôle du Grand Prêtre Zadok un ténor parfaitement projeté et manié avec souplesse. La basse Andreas Wolf, Un Lévite, assortit ses arias de vaillantes notes aiguës. Les deux sopranos offrent des timbres bien différentiés. Gwendoline Blondeel, dans la double incarnation de l'épouse de Salomon et de la Seconde prostituée, possède un timbre léger et radieux, qui ravit dans l'air tendrement joyeux dévolu à la reine ''Bless'd the day''/ Béni soit le jour (acte I/2), enrichi de solos de violon et de flûte. La métamorphose en Seconde prostituée la voit véhémente, presque harpie. Ana Maria Labin prête son timbre plus corsé à la reine de Saba. Ainsi de l'aria au lyrisme apaisé ''Will the sun forget to streak''/ Le soleil pourra-t-il oublier de sillonner, à l'acte III, avec hautbois obligé. Mais c'est dans la figure de la Première prostituée que la chanteuse déploie tout son art pour illustrer la désespérance de la vraie mère éplorée.

La prise de son en concert, fin juillet 2022 dans le nouvel auditorium de Namur, Le Grand manège, tout juste avant un autre au Festival de Beaune, offre un savant équilibre entre les forces en présence, orchestre, chœurs et solistes.

Texte de Jean-Pierre Robert 

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Plus d’infos

  • Georg Friedrich Haendel : Solomon, HWV 67. Oratorio en trois actes. Livret d'un auteur inconnu
  • Christopher Lowrey (Salomon), Ana Maria Labin (La Reine de Saba/Première Femme prostituée), Gwendoline Blondeel (Épouse de Salomon/Seconde Femme prostituée), Matthew Newlin (Zadok/Un Garde), Andreas Wolf (Un Lévite)
  • Chœur de chambre de Namur, Thibaut Lenaerts, chef de chœur
  • Millenium Orchestra, dir. Leonardo García Alarcón
  • 2 CDs Ricercar : RIC 449 (Distribution : Outhere Music)
  • Durée des CDs : 2 H 32 min
  • Note technique : etoile bleueetoile bleueetoile bleueetoile bleueetoile bleue (5/5)

CD disponible sur Amazon



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Haendel, Chœur de chambre de Namur, Millenium Orchestra, Leonardo García Alarcón, Thibaut Lenaerts, Gwendoline Blondeel, Christopher Lowrey, Ana Maria Labin, Matthew Newlin, Andreas Wolf

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