Skip to main content
PUBLICITÉ
  • Jean-Pierre Robert
  • Musique

CD : la Serenata a tre de Vivaldi

Vivaldi Serenata a tre

Pour son 70ème volume, l’Édition Vivaldi de Naïve présente la Serenata a tre RV 690, œuvre appartenant au genre de la sérénade, écrite pour célébrer un événement festif comme un mariage ou un anniversaire. Peu enregistrée, elle est servie ici par un trio vocal émérite et une direction d'orchestre raffinée due au claveciniste Andrea Buccarella.

LA SUITE APRÈS LA PUB

La serenata appartient à un genre à mi-chemin entre la cantate et l'opéra. Moins célèbre que La Senna festeggiante RV 693, la Serenata a tre, qui dissimule son vrai titre La Ninfa e il Pastore ou encore Eurilla e Alcindo, a été composée par Vivaldi à Venise dans les années 1717/1718 et créée semble-t-il l'année suivante à l'occasion des noces du gentilhomme français du nom de Goislard du Toureil, ami du Prêtre roux. La trame à trois personnages se déroule en contrée arcadienne : la nymphe Eurilla veut à tout prix conquérir le cœur du berger Alcindo, aidée de son amie Nicée. Mais le jeune homme reste insensible à ses avances, préférant préserver sa liberté de choix. Il sera finalement pris au piège du vrai amour et la dame en appellera à ses consœurs pour tourner l'arrogant en dérision et se venger d'une entreprise qui lui demanda tant d'efforts et de persuasion. C'est une sorte de marivaudage avant l’heure, chacun bien décidé à camper sur ses positions sur le thème ''je t'aime moi non plus''. Musicalement, la pièce est divisée en deux parties, comme le veulent les codes de la Sérénade, et ne comprend pas d'Ouverture. Il s'agit d'une succession d'arias sur le modèle da capo, relativement peu développées, précédées de récitatifs tout aussi concis. Car l'intrigue de ce qui s'apparente à un opéra miniature ne progresse que lentement.

La présente exécution ne mérite que des éloges. Par sa distribution vocale d'abord. Marie Lys prête sa voix de soprano claire au personnage clé d'Eurilla, pourvu de pas moins de six arias cultivant une grande variété d'affects, tour à tour lyriques ou sur le versant rapide. On y rencontre la virtuosité démonstrative, bardée de colorature, notamment dans le da capo, la romance gracieuse, pour une déclaration amoureuse sous des atours champêtres, la berceuse méditative, offre d'amour sur le ton mélancolique mais dans un tempo rapide. Ou encore la grande aria di furore, empruntée à la scène de genre (''Alla caccia d'un core spietato''/Pour chasser un cœur insensible) qui voit la femme résolue endosser les habits de chasseresse, dans des envolées grandioses avec accompagnement de cors. L'autre personnage féminin, Nicée, requérant une voix plus corsée, et dévolue à une mezzo soprano, voit en Sophie Rennert une belle découverte : un timbre fruité et ductile doté de beaux graves, comme dans l'aria la plus accomplie de la partition, ''Ad infiammar quel seno''/Pour enflammer son sein, dotée d'une partie de violon obligé, magistralement jouée par le Concermaster Boris Begelman. Le jeune ténor Anicio Zorzi Giustiniani campe le personnage d'Alcindo avec un savoureux mélange de décontraction et de noblesse. Son premier air avec concertino de bois ''Mi sento in petto''/J'entends dans ma poitrine, est un modèle de fin cantabile. Il est intéressant de constater que ce rôle pourvoit largement le sentiment de nature consubstantiel au genre de la sérénade. Ainsi de l'aria où le berger se fait imitatif du chant du rossignol, sur de belles inflexions des cordes et d'originales vocalises rapides. Dans ''Acque placide qui correte''/Ondes calmes qui courez, ouvrant la seconde partie, Vivaldi utilise la métaphore des eaux tranquilles qui offrent « la douce image d'une chère liberté ». Tandis que dans l'aria ''Dell'alma superba''/D'une âme aussi noble, avec interventions du basson, le berger affirme sa fierté de ne pas avoir à succomber au badinage d'Eurilla.

La direction sensible d'Andrea Buccarella ajoute à la réussite. Le claveciniste et chef d'orchestre pourvoit l'accompagnement des arias d'un extrême raffinement dans le traitement des cordes, avec un soin particulier aux fins de phrases souvent en diminuendo comme dans un souffle. La ductilité de l'Abchordis Ensemble y est pour beaucoup. L'enregistrement, en Suisse, restitue toute la fraîcheur de cette bien belle œuvre.
Texte de Jean-Pierre Robert 

Plus d’infos

  • Antonio Vivaldi : Serenata a tre RV 690 (Édition critique due à Alessandro Borin, 2010)
  • Marie Lys (Eurilla, soprano), Sophie Rennert (Nicée, mezzo-soprano), Anicio Zorzi Giustiniani (Alcindo, ténor)
  • Abchordis Ensemble, dir. Andrea Buccarella
  • 1 CD Naïve Edition Vivaldi vol. 70 : OP 7901 (Distribution : Believe Group)
  • Durée du CD : 71 min 52 s
  • Note technique : etoile orangeetoile orangeetoile orangeetoile orangeetoile orange (5/5) 

CD disponible sur Amazon

LA SUITE APRÈS LA PUB


Autres articles sur ON-mag ou le Web pouvant vous intéresser


Abchordis Ensemble, Andrea Buccarella, Antonio Vivaldi, Marie Lys, Sophie Rennert, Anicio Zorzi Giustiniani

Commentaires (0)

    Attach images by dragging & dropping or by selecting them.
    The maximum file size for uploads is 10MB. Only gif,jpg,png files are allowed.
     
    The maximum number of 3 allowed files to upload has been reached. If you want to upload more files you have to delete one of the existing uploaded files first.
    The maximum number of 3 allowed files to upload has been reached. If you want to upload more files you have to delete one of the existing uploaded files first.
    Commentaire de
    PUBLICITÉ