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  • Jean-Pierre Robert
  • Musique

CD : Anniversaire Fauré - Stéphane Degout et Alain Planès interprètent cinq cycles de mélodies

Anniversaire oblige, Stéphane Degout remet sur le métier quelques cycles de mélodies de Fauré, parées de son art consommé de diseur. Il fait équipe avec Alain Planès dont on connaît le sûr pianisme dans l'idiome français. Un partenariat proche de l'idéal pour repenser des pages incontournables, telles La Bonne Chanson ou L'Horizon chimérique, et en faire découvrir d'autres moins célébrées, comme Poème d'un jour ou Mirages.

Le genre de la mélodie occupe une place essentielle dans l’œuvre de Gabriel Fauré. Depuis son premier opus, en 1861, jusqu'au cycle de L'Horizon chimérique op.118,  le maître en écrira plus d'un centaine, la plupart réunies en cycles. Stéphane Degout et Alain Planès en investiguent cinq, autant de gemmes jalonnant un processus d'intense création qui a connu plusieurs phases. Ainsi de Poème d'un jour op.21, de 1878, sur des textes de Charles Grandmougin. Le désespoir amoureux y est traduit au fil de trois morceaux d'une grande virtuosité vocale : depuis l'émoi, en passant par la passion contrariée, jusqu'à la résignation et l'apaisement. Plus conséquent, l'ensemble de La Bonne Chanson op.61 s'adosse à la poésie de Verlaine. Les neuf mélodies qui le composent tissent un portrait de la bien-aimée. D'une rare spontanéité, là où « éclate comme une explosion de joie, comme la certitude d'un bonheur », note Vladimir Jankélévitch. On mesure la complexité de l'écriture à l'instabilité harmonique, à l'usage du chromatisme, à l’extrême mobilité rythmique. 

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Avec Le Jardin clos op.106, de 1914, Fauré nous immerge dans le monde symboliste du poète belge Charles Van Lerberghe. Ces huit pièces se signalent d'abord par la limpidité de l'écriture pianistique. Quant au chant, il atteint le dépouillement et vise à l'introspection comme à la simplicité de ton. Peu joué, ce cycle mérite pourtant l'écoute par ses évocations oniriques. Après plusieurs mélodies qui portent le discours jusqu'à l'exaltation, il se referme sur un sentiment de désenchantement mais aussi de sérénité. Les quatre morceaux composant Mirages op.113, de 1919, le sont sur des poèmes de Renée de Brimont, aux accents là encore symbolistes. L'univers aquatique des deux premiers côtoie l'hymne troublant à la nature et ses mystères puis une évocation de la danse. Dernier cycle, L'Horizon chimérique op.118 (1921) atteint la quintessence du dire fauréen. Le musicien âgé l'emprunte au jeune Jean de La Ville de Mirmont, tombé en novembre 1914 au Chemin des Dames. Il choisit quatre poèmes inspirants, au dire enflammé dans leurs alexandrins parfaits, que la musique soutient comme d'évidence avec autant de ferveur que de sérénité. L'expression musicale épouse l'inspiration littéraire dans un égal élan. Car il coule dans ces trois évocations marines entrecoupées d'un nocturne lunaire « une musique aux profondeurs élastiques, et toute travaillée d'invisibles courants », souligne Jankélévitch. 

Par la rectitude de la diction, qui caresse le mot et sculpte la phrase, le vrai des accents, l'art infini de la nuance, Stéphane Degout apparaît comme l'interprète choisi de ces mélodies. En cela il rejoint ses deux illustres prédécesseurs Charles Panzera et Gérard Souzay. Comme à propos du premier, interprète favori de Fauré lui-même, on peut parler de ce que Roland Barthes saluait : le « pouvoir solaire de la voix ». En effet la clarté du timbre épouse le naturel de la déclamation, l'absolu souci de la finesse de la langue, la délicatesse des liaisons : du murmure à l'éclat dans un égal souffle. Alain Planès, sûr routier du piano français, est le partenaire idéal, constamment soucieux de la richesse du langage fauréen, de ses inflexions tour à tour délicates et enflammées. Il le démontre encore avec une admirable exécution de la Ballade op.19, premier chef-d’œuvre pianistique de Fauré. Qui prend des tons mordorés sur le Pleyel ''Grand Patron'' de 1892. 

Ils sont enregistrés à l'abbaye de Royaumont dans une acoustique feutrée, très intimiste, la prise de son favorisant un piano très présent, notamment dans le registre grave.
Texte de Jean-Pierre Robert  

Plus d’infos

  • Gabriel Fauré : Poème d'un jour op.21. La Bonne Chanson op.61. Le Jardin clos op.106. Mirages op.113. L'Horizon chimérique op.118
  • Ballade pour piano op.19
  • Stéphane Degout (baryton), Alain Planès (piano)
  • 1 CD Harmonia Mundi : HMM 902382 (Distribution :[PIAS])
  • Durée du CD : 81 min 26 s
  • Note technique : etoile bleueetoile bleueetoile bleueetoile bleueetoile grise (4/5) 

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