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  • Jean-Pierre Robert
  • Musique

CD : Roberto Alagna fête ses 60 printemps et 40 ans de carrière

« Vivo per cantare », le toujours jeune Roberto Alagna défie les ans et les répertoires. Pour fêter 40 ans de carrière, débutée à vingt ans, il nous offre un magistral et généreux album associant airs d'opéra et chansons. Du plaisir communicatif comme sait en distiller notre ténor national.

Au sommet d'une carrière prestigieuse, Roberto Alagna se lance encore des défis : enregistrer un album de vingt titres, la plupart nouveaux, chantés en sept langues, explorant des répertoires aussi variés qu'improbables, de Pergolèse à Moniuszko, de Wagner à Adam, de l'opéra à la chanson. Le tout dans une forme vocale éblouissante sur laquelle les ans ne semblent pas avoir de prise. Un tour de force dont le ténor français est coutumier, fruit d'une insatiable curiosité, d'une vraie générosité aussi, qui ont forgé son image auprès du public. Son credo : « garder de la spontanéité », et ne pas tenter de forcer sa voix, même si la diversité des œuvres et des styles conduit à frôler les limites.

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À l'opéra, si le domaine italien est peu représenté, le récital pourvoit le premier morceau, avec l'air de Gabriele Adorno du Simone Boccanegra de Verdi, emportant l'auditeur dans un formidable élan. Et surtout un total investissement qui ne se démentira plus ensuite. Ainsi lorsqu'on bascule dans le répertoire français avec Faust et son immanquable ''Salut ! Demeure chaste et pure'', seule concession au morceau carte de visite. Mais quel bonheur devant un tel modèle de ligne de chant, un tel naturel confondant de vérité, jusqu'à cette ultime note en falsetto. Plus loin, l'air de Sextus de Polyeucte, sorte de cavatine à la française, transporte jusqu'à une fin exquise. Alagna se plaît à franchir allègrement les divers registres, depuis le lyrique du chant de Wilhelm Meister de Mignon - clin d’oïl à ses débuts à l'Opéra-Comique dans les années 1990 pour le Roméo de Gounod – en passant par la vignette quasi belcantiste qu'est l'air de Chapelou (Le Postillon de Lonjumeau), culminant sur un magique Ré aigu, jusqu'au ténor plus héroïque, Raoul (Les Huguenots), tendu à l'extrême. Côté allemand, et rappel d'une récente prise de rôle dans Lohengrin, les deux récits du IIIème acte révèlent une diction soigneuse, un agréable ton « à la française », et un impeccable investissement vocal.

Au chapitre des ''premières'' opératiques, on découvrira deux incursions dans le répertoire russe. Les couplets, en français, de l'Indien, extraits de Sadko de Rimski-Korsakov sont pur enchantement, comme chuchotés au fil d'envoûtantes modulations répétitives. Quant à l'air de Lenski de Eugène Onéguine, le désespoir palpable du héros sentant approcher une mort probable est traduit avec passion. Même pathétisme pour l'air de Jontek de Halka, l'opéra phare du polonais Moniuszko. Surprise enfin d'un air de Pergolèse : avec panache, si ce n'est audace, Alagna se frotte au baroque.

Reste le volet des chansons et du crossover. Tout ici coule de source, diction comme expression et bien sûr éclat. Qu'il s'agisse de la Sérénade française de Leoncavallo, ses climats contrastés, sa tension au point de fusion, de ''La Spagnola'' de Vincenzo di Chiara, rythmée dans la manière de la chanson napolitaine avec ses traits en fusée dans l'aigu. De ''Be My Love'' de Brodszky, et son charme américain, que couronne un rayonnant contre-ut. Ou encore des pages concoctées par les frères du ténor, dont ''L'Andalouse'', sorte de fandango brillant, et ''Sognare'', sur des paroles d'Alagna lui-même, vrai cri du cœur : « je vis pour chanter, non pour lutter ».

Qu'ajouter si ce n'est l'évident plaisir de faire plaisir, la joie d'ajouter quelques pépites à une discographie gigantesque, sous plusieurs labels. Et par-dessus tout le bonheur d'un style inimitable, d'une manière combien personnelle, avec cette volonté d'aller toujours plus loin dans la découverte et la performance. La contribution du Morphing Chamber Orchestra est à souligner. Sous la direction millimétrée de Giorgio Croci, toutes ces pages apparaissent sous leur meilleur jour : un accompagnement adapté à chaque contexte et style, outre la qualité des solistes, hautbois, violon, alto.

La prise de son en studio à Wien ménage un bel équilibre voix-orchestre, même si celle-ci est mise en avant. Alors que celui-là est placé en second plan pour ce qui est des chansons, comme le veut la tradition.
Texte de Jean-Pierre Robert

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Plus d’infos

  • ''Roberto Alagna 60''
  • Airs extraits de Simone Boccanegra (Giuseppe Verdi), Faust, Polyeucte (Charles Gounod), Le postillon de Lonjumeau (Adolphe Adam), Martha (Friedrich von Flotow), Lohengrin (Richard Wagner), Halka (Stanislaw Moniuszko), Eugène Onéguine (Piotr Ilitch Tchaïkovski), Sadko (Nicolas Rimski-Korsakov), Mignon (Ambroise Thomas), les Huguenots (Giacomo Meyerbeer), Lo frate 'nnamorato (Giovanni Battista Pergolesi)
  • Chansons de Riccardo Drigo, Ruggero Leoncavallo, Vincenzo di Chiara, Osmán Perez Freire, David & Frederico Alagna, Nicholas Brodszky, Roberto Alagna
  • Roberto Alagna, ténor
  • Morphing Chamber Orchestra, dir. Giorgio Croci
  • 1 CD Aparté : AP 351 (Distribution : [Integral])
  • Durée du CD : 85 min
  • Note technique : etoile rougeetoile rougeetoile rougeetoile rougeetoile rouge (5/5) 

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Morphing Chamber Orchestra, Roberto Alagna, Giorgio Croci

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