Memories of Murder : le chef-d’œuvre fascinant de Bong Joon-ho (en Blu-ray et DVD)

Note artistique : (5/5).

Synopsis :

En Corée du Sud, en 1986, le corps d'une jeune femme violée puis assassinée est retrouvé dans la campagne environnante. Deux mois plus tard, de nouveaux crimes similaires ont lieu. Une unité spéciale de la police est alors mise en place, sous les ordres d'un policier local et d'un détective spécialement dépêché de Séoul.

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• Titre original : Memories of Murder
• Support testé : blu-ray
• Genre : policier, thriller
• Année : 2003
• Réalisation : Bong Joon-ho
• Casting : Song Kang-ho, Kim Sang-kyung, Kim Loi-ha, Song Jae-ho, Byeon Hee-bong, Ko Seo-hie, Park No-Shik, Park Hae-il, Jeon Mi-seon
• Durée : 2 h 11 mn
• Format vidéo : 16/9
• Format ciné : 1,85/1
• Sous-titrage : français
• Pistes sonores : DTS-HD MA 5.1 coréen - DTS-HD MA 2.0 français
• Bonus HD sur le blu-ray : commentaire audio de Bong Joon-ho, Song Kang-ho, Kim Sang Kyung et Park Noh-sik - Memories, retour sur les lieux du crime, documentaire avec Bong Joon-ho, Song Kang-ho, en exclusivité mondiale (2018, 63 mn 16, écrit et réalisé par de Jésus Castro-Ortega) - Bong Sound, entretien avec Choi Tae-youn (14 mn)
• Bonus uniquement sur le DVD du film : 7 scènes coupées avec commentaire de Bong Joon-ho
• Bonus SD sur le DVD de bonus : Memories, retour sur les lieux du crime, documentaire avec Bong Joon-ho, Song Kang-ho, en exclusivité mondiale (2018, 63 mn 19, écrit et réalisé par de Jésus Castro-Ortega) - Bong Sound, entretien avec Choi Tae-youn (14 mn 02) - Making of (2003, 17 mn 39) - entretien avec Taro Iwashiro, compositeur (14 mn 02) - décors et accessoires (11 mn 07) - costumes et maquillages (12 mn 08) - effets spéciaux (5 mn 09) - bande annonce 2004 (2 mn 20) - bande annonce 2017 (1 mn 29)
• MediaBook : Blu-ray et DVD du film - DVD des bonus - un livret sur l'histoire du tournage du film (40 pages) - la reproduction du storyboard intégral réalisé par Bong Joon-ho et traduit en français par Seo Seung-hee (366 pages)
• Éditeur : La Rabbia

Commentaire artistique

Second long-métrage de Bong Joon-ho, Memories of Murder a établi en 2003 la renommée du cinéaste coréen qui a été plébiscité dans son pays comme à l’international, grâce à ce thriller policier inspiré d’un réel tueur en série local jamais retrouvé. Pour cette édition anniversaire des 15 ans, le film a été restauré en 4K et bénéficie d’une édition ultime limitée à 2500 exemplaires, réunissant dans un splendide coffret collector la reproduction du storyboard traduit en français (366 pages) et un Mediabook comprenant le film, un documentaire de 2018 de Jésus Castro-Ortega en exclusivité mondiale, les suppléments d’époque et un livret sur le tournage. Devenu un classique culte du thriller coréen, Memories of Murder a été écrit par Bong Joon-ho en s’inspirant de sources diverses : en effet, si l’enquête policière narrée dans le film reprend, de manière très documentée, les éléments d’une série de dix meurtres authentiques non élucidés dans la campagne de la ville de Hwaseong entre 1986 et 1991, le cinéaste s’est aussi basé sur la dramatisation des faits qu’en a donnée Kim Kwang-rim dans sa pièce de théâtre « Come and See Me », dont deux des comédiens seront au générique de son film, et du roman graphique « From Hell » d’Alan Moore. L’écriture du scénario résulta de minutieuses recherches dans les archives et sur les tueurs en série, l’affaire de Hwaseong étant une première en Corée. Cependant, Memories of Murder ne se limite pas à une simple enquête policière, c’est surtout une plongée dans la Corée des années 80 à une époque de transition, lorsque la dictature militaire de Chun Doo-hwan, avec ses massacres de Kwangju et son cinéma muselé, laisse la place à un régime plus démocratique mais corrompu avec ses invraisemblables exercices de black-out et sa police incompétente, si démunie (pas d’analyse ADN sur place) qu’elle fait appel aux chamanes. C’est ce contexte qui pèse sur l’ambiance presque fantastique et le style morose du film au ciel grisâtre et aux pluies déprimantes. Très soucieux de son prochain, le cinéaste ne débuta le film qu’après une cérémonie d’apaisement des âmes des victimes et dota tous ses personnages d’une forte humanité, de ses policiers typés aux méchants. La galerie de portraits témoigne d’un grande observation psychologique avec un flic local un peu limite et empathique joué par Song Kang-ho, son acolyte ultra violent interprété par Kim Loi-ha et un policier venu de Séoul, incarné par Kim Sang-kyung, qui perdra tout idéalisme, contaminé par ses collègues et par son impuissance à identifier le meurtrier. Côté suspects, deux des protagonistes resteront mémorables avec Park No-Shik qui compose un pauvre d’esprit défiguré, le suspect idéal, et Park Hae-il qui conjugue la beauté efféminée et la froide détermination de son personnage. Mais ce casting remarquable ne suffirait pas à hisser le film au niveau de chef-d’œuvre sans la maestria de la mise en scène. Des plans-séquences vertigineux, avec steadycam et travellings savants, alternent avec la théâtralisation des scènes plus intimistes (commissariat, école, maison) et bénéficient d’un travail sophistiqué sur la lumière et la colorimétrie. Bong Joon-ho maîtrise parfaitement le langage cinématographique, n’hésitant pas à mélanger les genres, à densifier la complexité et la profondeur des sous-entendus. Sa description exaspérée d’une grande noirceur déjoue habilement la fascination morbide et le caractère spectaculaire de son sujet qui ne sombre jamais dans la caricature. La narration combinant l’imprévisibilité et l’émotion sourde interdit intelligemment toute possibilité de se faire une opinion tranchée sur le psychopathe : jamais retrouvé, celui-ci (s’il est vivant quelque part en Corée ou ailleurs) a peut-être vu le film et affronté le regard de l’inspecteur Park dans le plan final saisissant et allégorique. Du très grand art. Un thriller sidérant, digne des maîtres du genre, Hitchcock, Fincher et De Palma, proposé dans une magnifique et très complète édition ultime.

Commentaire technique

Image : copie HD, version restaurée 4K, belle définition bien détaillée en dépit d’une texture légèrement granuleuse (tournage en 35 mm), bon contraste volontairement limité pour renforcer les ambiances pluvieuses et nocturnes, étalonnage naturaliste, colorimétrie réaliste aux tons peu saturés et aux teintes froides délibérément ternes exceptées les séquences ensoleillés dans les champs aux teintes plus chaudes

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Son : mixage coréen 5.1 dynamique reflétant le travail très recherché sur le son, dialogues centrés clairs, ambiances naturalistes favorisant les sons naturels (pluie, vent) répartis efficacement sur tous les surrounds, surrounds et LFE sollicités avec efficacité et recréant une immersion sonore très suggestive, accrue par l’intensité de la musique ; VF 2.0 moins suggestive et plus artificielle, à déconseiller