L'Île aux chiens : récit nippo-canin en stop-motion pharaonique (en Blu-ray, DVD et VOD)

Note artistique : (4/5).

Synopsis :

En raison d'une épidémie de grippe canine, le maire de Megasaki ordonne la mise en quarantaine de tous les chiens de la ville, envoyés sur une île qui devient alors l'Ile aux Chiens. Le jeune Atari, 12 ans, vole un avion et se rend sur l'île pour rechercher son fidèle compagnon, Spots. Aidé par une bande de cinq chiens intrépides et attachants, il découvre une conspiration qui menace la ville.

LA SUITE APRÈS LA PUB

• Titre original : Isle of Dogs
• Support testé : blu-ray
• Genre : animation, comédie, aventure
• Année : 2018
• Réalisation : Wes Anderson
• Casting voix VO : Bryan Cranston, Frances McDormand, Edward Norton, Liev Schreiber, Greta Gerwig, F. Murray Abraham, Scarlett Johansson, Jeff Goldblum, Bill Murray, Bob Balaban, Fisher Stevens, Harvey Keitel, Yoko Ono, Tilda Swinton
• Casting voix VF : Vincent Lindon, Romain Duris, Hippolyte Girardot, Mathieu Amalric, Yvan Attal, Daniel Auteuil, Greta Gerwig, Isabelle Huppert, Louis Garrel, Léa Seydoux, Aurore Clément, Nicolas Saada, Jean-Pierre Léaud, Frantz Confiac, Adrien Larmande, Yumi Fujimori, Patrick Osmond, Bernard Métraux, Damien Boisseau
• Durée : 1 h 41 mn 09 s
• Format vidéo : 16/9
• Format ciné : 2,39/1
• Sous-titrage : français, anglais, danois, néerlandais, finlandais, allemand, russe, suédois, estonien, letton, lithuanien, ukrainien
• Pistes sonores : DTS-HD MA 5.1 anglais - DTS 5.1 français, allemand, russe - Dolby Digital 5.1 ukrainien
• Bonus : les animateurs (3 mn 42) - interview des acteurs (5 mn 09) - les marionnettistes (4 mn 03) - une ode aux chiens (2 mn) - la ville de Megasaki et l’île poubelle (2 mn 59) - les conditions météorologiques et l’environnement (3 mn 04) - film annonce (2 mn 38) - galerie de photographies (1 mn 18)
• Éditeur : 20th Century Fox Entertainment

Commentaire artistique

Après Fantastic Mr. Fox en 2009, le second film d’animation de Wes Anderson L’Île aux chiens s’inscrit dans la singularité d’une œuvre et d’un style qui ne cessent de surprendre, concrétisés entre autres parThe Grand Budapest Hotel en 2014. Le scénario de L’Île aux chiens doit son originalité à son écriture à plusieurs mains réunissant autour de Wes Anderson, Roman Coppola, Jason Schwartzman et Kunichi Nomura qui ont concocté une histoire étonnante mêlant fascination du cinéma japonais et de la culture nipponne, empathie pour les canidés et adaptation dystopique du thème du justicier s’opposant aux tyrans. Pour parvenir à transposer l’imagination débordante d’idées qui nourrit ce récit foisonnant où des chiens s’expriment comme des humains, le choix de l’animation s’est avéré le plus pertinent. Néanmoins, à l’ère de la technologie numérique, c’est une technologie des origines qui a été retenue : l’image par l’image (stop-motion en anglais), déjà employée pour Fantastic Mr. Fox. Une partie des équipes de ce film a donc été mobilisée dans la production de L’Île aux chiens dont la réussite artistique et la prouesse technique indéniable (cf. bonus) nécessitèrent le travail de 670 personnes, dont 70 marionnettistes et 38 animateurs, qui pendant plus de deux années s’affairèrent afin de donner vie à un millier de marionnettes disposées dans 240 décors miniaturisés ! Conformément à la vision du cinéaste, cette animation ne se contente pas d’apporter l’étrangeté poétique de sa technique, mais matérialise physiquement l’univers particulier de la fable avec son humour, ses valeurs et ses émotions palpables. Porté par un casting voix d’excellents acteurs (en VO comme en VF), L’Île aux chiens reflète l’admiration de ses auteurs pour les cinéastes japonais, spécialement Akira Kurosawa et ses films sous-tendus par une humanité exemplaire et dont l’acteur fétiche Toshiro Mifune a servi de modèle à la marionnette du maire Kobayashi. Le style graphique du film doit aussi beaucoup à l’art de l’estampe (Hokusai, Hiroshige) tout en se défendant d’un quelconque mimétisme visuel au profit d’une esthétique qui lui est propre. Usant avec dextérité des dialogues en anglais et en japonais non sous-titré et fondé sur le symbolisme du bannissement des chiens, le récit dépeint différents cabots aux caractères bien typés - doublés par des stars américaines - qui évoquent métaphoriquement les dérives sociales et les fêlures des individus dans ce monde futur où les ordures ont une place de choix. Du côté humain, le jeune Atari et le maire - doublés par des acteurs japonais - expriment la force de l’amitié et de la rédemption, tandis que le pendant féminin avec Tracy Walker, étudiante déterminée, et Nelson traductrice sans état d’âme possède un doublage jubilatoire (Greta Gerwig et Frances McDormand). Avec l’immense talent de la foule des techniciens réunis pour le film, la magie de L’Île aux chiens opère avec efficacité tout en bénéficiant de la très belle photographie de Tristan Olivier, digne des meilleurs films avec acteurs, et de la partition d’Alexandre Desplat aux sonorités suggestives inspirées du Japon (usage spectaculaire du taiko). La munificence visuelle de cette animation conjuguée à un discours politique condamnant toute forme de totalitarisme place L’Île aux chiens certainement plus du côté du film d’auteur que du divertissement pour enfants ! Véritable spectacle qui suppose une gymnastique constante de l’attention des yeux comme de l’entendement, voilà un film à part, audacieux et fascinant, qui ne manquera pas de susciter des analyses en tout genre. Une dystopie bien chimérique et pourtant si familière.

Commentaire technique

Image : copie HD, images d’une précision chirurgicale (tournage image par image avec canon EOS 1DX, prise de vue capturée à 5,2 K, Master Format 2K) sur les nombreuses textures (décors, costumes, accessoires), excellent contraste, étalonnage lumineux à tendance chaude, colorimétrie somptueuse cultivant les ambiances irréelles aux tons nuancés et aux teintes diversifiées

LA SUITE APRÈS LA PUB

Son : mixage anglais 5.1 très dynamique avec spatialisation appuyée des dialogues et des ambiances mettant en valeur les caractérisations vocales comme la reconstitution sonore des environnements et la musique ample d’Alexandre Desplat ; VF soignée plus resserrée, ne pouvant rivaliser avec la caractérisation originale mais ayant sa personnalité hexagonale