Le Lion et le Vent : une vision hollywoodienne singulière et épique (en Blu-ray et DVD)

Note artistique : (3,5/5)

Synopsis

Au Maroc, en 1904, un conflit oppose la France, l'Allemagne et la Grande-Bretagne. Le chef Berbère El-Raisuli, le Magnifique, enlève Eden Perdicaris, une jeune américaine et ses deux enfants. Par cet enlèvement, il veut provoquer un incident diplomatique et s'opposer au sultan Abdelaziz, compromis avec les puissances occidentales…

LA SUITE APRÈS LA PUB

• Titre original : The Wind and the Lion
• Support testé : Blu-ray
• Genre : aventure, historique
• Année : 1975
• Réalisation : John Milius
• Casting : Sean Connery, Candice Bergen, Brian Keith, John Huston, Geoffrey Lewis, Steve Kanaly, Vladek Sheybal, Nadim Sawalha, Roy Jenson, Deborah Baxter
• Durée : 1 h 59 mn 12
• Format vidéo : 16/9
• Format ciné : 2,35/1
• Sous-titrage : français
• Pistes sonores : DTS-HD MA 2.0 monophonique anglais, français
• Bonus : édition Mediabook collector contenant le Blu-ray et le DVD du film - commentaire audio en VOST autour de la musique de Jerry Goldsmith par Yavar Moradi, Clark Douglas, Jens Dietrich et W. David Lichty, animateurs du podcast The Goldsmith Odyssey - John Milius, la genèse d’un mythe, interview de Samuel Blumenfeld, journaliste au Monde (9 mars 2020, 42 mn 48) - livre de 116 pages intégré à l'étui : « John Milius, le prisonnier du désert » par Stéphane Chevalier & Christophe Chavdia
• Éditeur : Rimini Editions

Commentaire artistique

Alors que Sir Sean Connery vient de nous quitter le 31 octobre 2020, il est tentant de le revoir dans un de ses rôles qui ne soit pas un James Bond… même si, dans Le Lion et le vent (en VO le vent et le lion !), il est l’interprète improbable, parlant écossais, du berbère descendant du prophète Mahomet, Mohamed ben Abdallah el-Raisuni ! Du personnage à la silhouette trapue, bandit pour les uns, héros pour les autres, l’acteur écossais fera une sorte de gentleman du désert bien éloigné de la réalité historique. Mais il faut dire que tout le film, écrit et réalisé par John Milius, est du même tonneau : à l’origine du scénario, il y a une « affaire Perdicaris » constituée par l’enlèvement en 1904 à Tanger de deux expatriés gréco-américains et qui va se solder par une confrontation entre le sultan de Tanger Abd al-Aziz et le gouvernement de Theodore Roosevelt, alors en pleine campagne de réélection. Finalement El-Raisuni obtiendra la rançon et sera nommé pacha : rien de semblable dans Le Lion et le vent conçu comme une épopée vaguement inspirée de l’affaire narrée dans un article du magazine American Heritage et de la biographie du Chérif par Rosita Forbes. John Milius a préféré imaginer l’enlèvement d’une jolie blonde, Candice Bergen, et ses deux enfants et intensifier la dramatisation de l’intrigue par un échange musclé et meurtrier entre les Allemands, les Américains et les Bédouins. Il ne faudra donc pas regarder ce film épique comme une reconstitution historique mais tout simplement comme un grand film d’aventures qui fait la part belle à El-Raisuni (le lion) et Theodore Roosevelt (le vent), héros masculins machistes plus grands que nature tels que les affectionne John Milius. Theodore Roosevelt n’était-il pas le prototype du yankee sûr de son bon droit ne reculant pas devant l’usage de la force pour le faire respecter ? Dans ce film pas une image ne correspond à la réalité : il a été tourné intégralement en Espagne dont les paysages (Almeria, Meseta, Huelva) et les monuments (Séville, Grenade, Madrid) feront office de substituts impressionnants aux villes marocaines de Tanger et de Fès, et même au Yellowstone National Park ! La magie du cinéma opère cependant : tous ces lieux, splendidement photographiés par Billy Williams, serviront de cadre à une épopée riche en scènes mouvementées - réglées par Terry Leonard - et en magnifiques décors orientaux, sublimés par la partition lyrique de Jerry Goldsmith (cf. bonus) qui lui vaudra un Oscar. Pour qui aime les grandes fresques épiques à la manière de Lawrence d’Arabie le film de John Milius est une tentative attrayante de le réitérer : la séduction de Candice Bergen et le charisme de Sean Connery font merveille dans ces péripéties romanesques hautes en couleurs. Et ils seront bien secondés par le reste du casting incluant Brian Keith, irrésistible en président fougueux prompt à manier le fusil, et John Huston, exquis en fin diplomate. Avec ce film, John Milius, réputé pour son talent de scénariste et son profil controversé de rebelle, démontrait qu’il était un réalisateur efficace. Il se définit lui-même comme un être contradictoire, militariste et anarchiste zen, revendiquant la violence inhérente de son cinéma qui valorise des caractères solitaires, régis par un code de l’honneur. Si Le Lion et le vent, imprégné des idéaux de son auteur, a divisé la critique qui le qualifia de film satirique, impérialiste, raciste, etc., il demeure un excellent film d’aventures, quelle que soit la manière de l’appréhender, et témoigne de la vision singulière, non consensuelle, défendue par ce cinéaste du Nouvel Hollywood. Intéressant.

LA SUITE APRÈS LA PUB

Commentaire technique

Image : copie HD, nouveau master HD, excellente définition avec un piqué impressionnant et une belle restitution des textures, grain argentique homogène (tournage en 35 mm), image propre hormis ponctuellement quelques taches, contraste naturaliste pour une image toujours lumineuse, étalonnage chatoyant à la colorimétrie chaude aux tons saturés

Son : mixage anglais 2.0 monophonique (pourtant la copie 70 mm d’exploitation comportait 6 pistes stéréo et le blu-ray Warner Archives de 2014 était en DTS-HD MA 5.1), dialogues clairs, bon équilibre général avec un dynamique parfaite pour la musique de Jerry Goldsmith ; VF 2.0 monophonique claire, soignée mais doublage prédominant qui écrase les ambiances