Remorques : un classique à la production très mouvementée (en Blu-ray)

Note artistique : (4/5)

Synopsis

Le capitaine du remorqueur le Cyclone, André Laurent, se voit contraint de quitter précipitamment la noce d'un de ses marins pour aller au secours du Mirva. Il abandonne ainsi sa femme Yvonne et la mariée. Au matin, le Cyclone remorque le Mirva avec à son bord Catherine, la femme du capitaine dont André Laurent va tomber amoureux…

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Titre original : Remorques
Support testé : Blu-ray
Genre : drame
Année : 1939
Réalisation : Jean Grémillon
Casting : Michèle Morgan, Jean Gabin, Madeleine Renaud, Charles Blavette, Jean Marchat, Nane Germon, Jean Dasté, René Bergeron, Henri Poupon, Marcel Perès, Fernand Ledoux
Durée : 1 h 24 mn 15
Format vidéo : 16/9
Format ciné : 1,37/1 Noir et Blanc
Sous-titrage : français
Piste sonore : DTS-HD MA 1.0 monophonique français
Bonus : présentation du film par Serge Toubiana (2004, SD, 5 mn 36) - L'Œil du cyclone, entretien inédit avec Tangui Perron, historien et spécialiste du monde ouvrier (2023, 23 mn 27) - nouvelle bande annonce 2023 (2023, 1 mn 48)
Éditeur : Carlotta Films

Commentaire artistique

Remorques (1939) de Jean Grémillon, récemment restauré, est une aubaine cinéphilique pour revoir dans d’excellentes conditions techniques cette production au tournage tumultueux pour cause de conflit. Lorsqu’il entreprend de tourner son film, pour le compte du producteur Joseph Lucachevitch, le cinéaste est déjà reconnu pour ses drames Gueule d’amour (1937) avec Jean Gabin et L’Étrange Monsieur Victor (1938) avec Raimu. Remorques est adapté du roman « Remorques » (1935) de Roger Vercel inspiré des prouesses de sauvetage en haute mer du remorqueur Iroise commandé par Louis Malbert. Le scénario original signé par le romancier et coécrit par Charles Spaak et André Cayatte pour l’UFA est retravaillé après rachat des droits par la SDIF : c’est Jacques Prévert qui reprend l’intrigue et peaufine les dialogues à la demande de Jean Grémillon. Pour le tournage, le cinéaste va bénéficier de nombreux talents dont ceux de Louis Daquin pour la mise en scène, Armand Thirard pour sa très belle photographie aux éclairages recherchés et Alexandre Trauner pour ses décors réalistes et suggestifs. L’interprétation est de haut vol : Jean Gabin, qui joue le capitaine André Laurent, est la star masculine d’avant-guerre, la jeune et jolie Michèle Morgan qui incarne son amante Catherine a déjà une belle réputation et Madeleine Renaud, grande actrice de théâtre, sera Yvonne, l’épouse souffrante du capitaine. Le reste du casting réunis d’excellents acteurs comme Fernand Ledoux ou Marcel Perès. Après quinze jours en extérieurs dans la région de Brest en juillet 1939, le tournage de Remorques se poursuit aux studios de Billancourt mais, en septembre, la guerre, la mobilisation (Jean Grémillon, Louis Daquin, Jean Gabin) et le départ de Michèle Morgan aux USA, stoppent la réalisation. Il faudra attendre mars 1940 pour que le tournage reprenne, notamment la scène de la tempête qui est finalement filmée en studio avec des maquettes (plus des plans avec acteurs tournés sur un vrai bateau). Juste avant l’entrée des nazis dans Paris, Louis Daquin et le monteur Marcel Cravenne vont déposer les bobines en zone Libre. Le tournage est achevé en septembre 1941 et le film, monté par Jean Grémillon, est présenté en novembre : ce sera le plus grand succès du cinéaste. Ce drame romanesque a de quoi satisfaire l’attente du public en mêlant habilement l’aspect captivant d’un documentaire sur l’univers des sauveteurs bretons et la fiction d’une passion amoureuse tumultueuse. La mise en scène de Remorques est par ailleurs saisissante, avec ses scènes intenses (sauvetage, tempête, Brest), ses recherches musicales et sonores (sirène, mer, vent) qui se terminent en crescendo par une scène finale déroutante et métaphorique (manifestement rebelle à l’Occupation). Si le duo Jean Gabin et Michèle Morgan de Quai des Brumes (1938) est à nouveau réuni, Remorques joue dans un tout autre registre bien que Jacques Prévert ait scénarisé les deux films : le style dépouillé et direct de Jean Grémillon, nettement plus réaliste, débouche sur un film romantique et social traversé par deux splendides caractérisations féminines et par un personnage de capitaine courageux et paternaliste, confronté à sa vulnérabilité sentimentale et à un dilemme passionnel sans issu. Malgré sa scène de tempête en chambre peu convaincante, le lyrisme sans afféterie de Jean Grémillon fait de Remorques une tragédie maritime et psychologique toujours aussi fascinante.

Commentaire technique

Une restauration 4K, supervisée par MK2 Films avec la participation d’Arte France-Unité Cinéma et réalisée par le laboratoire Éclair Classics

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Image : copie HD, excellente définition et piqué sur les détails, texture argentique homogène (tournage en 35 mm, Master Format 4K restauré en 2022), copie stable et très propre, très beau contraste aux lumières tranchées, noirs denses, blancs nuancés, gamme de gris très harmonieuse

Son : mixage français 1.0 monophonique, dialogues clairs et sans saturation, bonne dynamique sur les effets sonores (sirènes, mer démontée, bateaux) et sur la musique de Roland-Manuel, très léger souffle et spectre limité