"Bella Figura" de Yasmina Reza, avec Emmanuelle Devos, au Théâtre du Rond-Point jusqu'au 31 décembre
Texte et mise en scène : Yasmina Reza
Avec : Emmanuelle Devos, Camille Japy, Louis-Do de Lencquesaing, Micha Lescot, Josiane Stoléru
LA SUITE APRÈS LA PUB
|
Jusqu'au au 31 décembre 2017 au Théâtre du Rond-Point (Paris)
www.theatredurondpoint.fr
Bien que se déroulant dans un espace découvert, théoriquement à l’abri de cette lente sensation d’étouffement provoquée par un lieu fermé, hermétiquement clos, « Bella Figura », la pièce de Yasmina Reza va peu à peu submerger chacun des protagonistes se retrouvant par hasard dans un même lieu. Pourtant tout semble baigner dans la banalité la plus prosaïque lorsqu’apparaît la première scène plutôt insolite, provoquée par la présence d’une voyante voiture jaune installée sur la scène du Théâtre du Rond-Point de manière quasiment hyperréaliste.
Deux amants se chamaillent vaguement à propos du choix d’un restaurant et de la façon dont ils vont passer la soirée. Après quelques échanges plutôt aigres-doux leur départ vers ce lieu se précise mais Andrea et Boris Amette (les deux amants) vont s’affronter à un trio de personnages que le hasard décidément imprévisible a décidé de leur faire rencontrer. Bizarre trio que celui-ci, constitué d’une vieille dame (Yvonne Blum) flanquée de son fils (Eric Blum) et de sa jeune compagne (Françoise Hirt). Yasmina Reza s’attarde un peu sur le personnage de la vieille dame, constamment obsédée et terrifiée à l’idée de perdre son sac à main toujours miraculeusement retrouvé par son fils ou par l’un des protagonistes de la pièce. Bien qu’apparemment cordiale la coexistence entre les deux personnages masculins s’avère délicate, surtout lorsque Boris Amette révèle sa situation professionnelle catastrophique…La relation qui s’établit entre Andrea et Françoise au début semble prendre un aspect agressif pour finalement s’orienter vers l’apaisement. Toutes ces luttes sourdes, vaguement hostiles sont de manière sinistre amplifiées par la présence obsédante de batraciens, locataires d’une mare toute proche, dont les coassements ininterrompus imposent aux personnages de cette pièce dérivant lentement vers l’inconnu, leur abominable et obligatoire concert…La pièce s’achève sur une sorte de non-dit, renvoyant dans les ténèbres ces personnages surgis du néant et destinés à y retourner en toute diligence.
Yasmina Reza, qui a écrit la pièce et qui en assure également la mise en scène s’est entourée d’une distribution somptueuse puisque dans les rôles féminins elle peut aligner les noms prestigieux d’Emmanuelle Devos incarnant à la perfection Andrea alors que Josiane Stoléru se glisse avec beaucoup de présence dans celui d’Yvonne Blum, la vieille dame dont on souhaite l’anniversaire. Camille Japy souligne avec beaucoup d’intuition le désarroi de Françoise Hirt, amie de l’épouse officielle de Boris Amette alors que Louis-Do de Lencquesaing (Boris Amette) et Micha Lescot (Eric Blum) ne font qu’un avec leurs personnages respectifs inventés par Yasmina Reza. Un spectacle étrange qu’il faut perpétuellement décrypter au fur et à mesure que se déroule cette pièce décidément truffée de mystères insondables, dissimulés sous l’aspect débonnaire d’une réalité qui constamment se dérobe...
Texte de Michel Jakubowicz
LA SUITE APRÈS LA PUB
|
Autres articles sur ON-mag ou le Web pouvant vous intéresser
Théâtre du Rond-Point, Agenda, Yasmina Reza